Robert Polidori
« Pourquoi les murs n’auraient-ils pas enregistré et superposé toutes les vibrations affectives des occupants et visiteurs qui se sont succédé ? » Voilà la question qui hante le photographe Polidori depuis plus de vingt ans et qui rend ses photographies d’intérieurs et d’architectures extérieures aussi bouleversantes, obsédantes, longtemps après les avoir vues. Le Musée d’art contemporain de Montréal présente, dans la lignée des grandes expositions consacrées aux photographes contemporains, Robert Polidori, du 22 mai au 7 septembre 2009.
Considéré comme l’un des plus grands photographes de notre époque, Robert Polidori transcende les limites de la photographie en captant, paradoxalement dans des lieux le plus souvent abandonnés et vides de présence humaine, les traces de la condition humaine. Véritable portrait social, chaque photo livre l’âme de ses occupants successifs, superposant passé et présent dans des photographies poignantes de douleur et de beauté.
L’exposition présente un bilan de son œuvre en cinquante-neuf photographies couleur grands formats, comptant parmi les principales séries réalisées par l’artiste au cours des vingt dernières années, soit entre 1985 et 2007. D'abord Versailles, une série sur laquelle l’artiste travaille depuis 1985, met en lumière les restaurations successives de ce lieu de mémoire collective hautement symbolique, éveillant chez le spectateur une conscience historique. Dans une œuvre comme Velours frappé et l’échelle, l’artiste rend la fuite du temps visible à travers une enfilade d'ouvertures. La série quasi picturale Beyrouth (1994-1996), par le rendu des lignes et des matières et par la douceur des tons, laisse entrevoir des bribes de sa destruction annonçant les visions apocalyptiques des séries qui suivront. La Havane (1997-2000) témoigne de sa double vie urbaine : celle faste et passée, de ses riches demeures coloniales et celle actuelle et délabrée des mêmes lieux. Pripiat et Tchernobyl (2001) fait de nous les témoins de la pire catastrophe nucléaire de l’histoire, survenue en 1986. Tout n’est qu’exil, dévastation et abandon. L'anéantissement est porté à son comble avec la série La Nouvelle-Orléans (2005-2006) réalisée dans les mois qui ont suivi l’effroyable cyclone Katrina.
À ce corpus s’ajoutent une série consacrée à New York en 1985 et une exploration critique du paysage urbain à travers les immeubles d’Amman en Jordanie (1996) et les rues de Varanasi en Inde (2007).
« Quand je dirige mon appareil vers quelque chose, écrit l’artiste, c’est comme si je posais une question. Et l’image qui en résulte est comme une réponse. » Autant de réponses qui vous questionneront au plus profond de votre être.
Né à Montréal en 1951, Robert Polidori vit et travaille à New York. C’est le visionnement du film Wavelength de Michael Snow en 1969, alors qu’il étudie au collège en Floride, qui va changer sa vie. Il se rend à New York et devient l’assistant de Jonas Mekas aux Anthology Film Archives. Dans les années 1970, il réalise plusieurs films d'avant-garde qui traitent de l’intervalle entre l’immobilité et le mouvement. En 1979, il obtient une maîtrise en arts de la State University of New York et se consacre dès lors entièrement à la photographie, travaillant notamment pour The New Yorker à partir de 1998. La lecture du livre L’Art de la mémoire de Frances Yates lui révèle les systèmes mnémoniques et l’importance des lieux dans les théâtres de la mémoire. Ce sera déterminant dans son travail, dans la « lecture » des strates de mémoire cumulées dans les pièces et les espaces qu’il photographie. Son travail de photojournalisme lui permet de voyager à travers le monde et de poursuivre parallèlement sa démarche artistique. Polidori a participé à de nombreuses expositions individuelles et collectives. En 2006, le Metropolitan Museum of Art à New York lui consacrait une exposition.
Il s’agit d’une première exposition à caractère rétrospectif présentée à ce jour. Paulette Gagnon, conservatrice en chef du Musée, en est la commissaire. Une exposition itinérante sera mise en circulation par le MAC à compter d'octobre 2009, après la présentation à Montréal.
Un catalogue est en vente au prix de 44,95 $ à la librairie Olivieri du Musée et chez votre libraire.
Nous désirons exprimer nos remerciements à la RBC Fondation, Camera Work, Berlin, et les Éditions Steidl, Göttingen, pour leur généreuse contribution à la réalisation de cette exposition.
Extrait de ce site
Et si ce travail est du photojournalisme, je ne sais plus ce que veux dire le mot photographie.
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No Pasaran
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