Et ils produisent toujours des films holographiques. D'ailleurs si tu peux m'expliquer à quoi ca sert ??? Ca éclairera ma lanterne :)
Merci Aurélien pour ton message qui me réjouit.
Les films holographiques sont des supports photo-chimiques à très haute résolution, pour la plupart gélatino-bromure à grain ultra-fin, mais on peut faire des hologrammes analogiques avec des gélatines bichromatées ou des résines photo-sensibles. Et on peut aujourd'hui imprimer des hologrammes en dehors de toute surface photo-sensible, il suffit de regarder les hologrammes de sécurité sur les cartes bancaires, les billets de banque, etc. Au passage, il y a une branche de la microtechnique qui s'appelle : nano-impression, dans laquelle on imprime des motifs nanométriques avec une espèce de presse capable de transférer des stries sub-microniques sur un support qui va en conserver l'empreinte. On fabrique le motif de départ par faisceau d'électrons (résolution : dans les 30 nanomètres).
L'hologramme est l'enregistrement, en lumière cohérente, de franges d'interférences.
En fait, 'hologramme' et 'testament olographe' ont la même racine grecque, 'olographe' au sens des notaires veut dire : entièrement écrit, et 'hologramme' veut dire : enregistrement intégral (analogique ou numérique) d'une onde optique cohérente en amplitude et en phase.
Traditionnellement, pour un hologramme analogique, on éclaire un objet avec un laser, et on enregistre les interférences entre la lumière diffusée par l'objet et une partie de la lumière provenant du laser. Un dispositif d'éclairage approprié de la plaque après développement fait apparaître une image réellement tri-dimensionnelle, ce n 'est pas une illusion de relief à partir de 2 vues jouant sur les effets de parallaxe comme dans la photo stéréoscopique.
Sans rentrer dans les détails, le point important est que ces franges ont une période qui peut être aussi fine que la demi longueur d'onde, dans les 0,3 micron si le laser est à 0,6 micron. Une période de 0,3 micron c'est 3000 cycles par millimètre.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, on sait fabriquer des gélatino-bromures capables d'enregistrer cela, 3000 cy/mm depuis la fin du XIXe siècle, en particulier avec les plaques Lippmann. Certes, la sensibilité ISO de ces supports est désespérément faible, mais, sans provocation, on peut dire que c'est une technologie du XIXe siècle. Ces plaques & films n'ont aucun intérêt pour la photographie telle que nous la concevons, sauf éventuellement si on souhaitaite refaire des photos couleur selon le procédé LIPPMANN, où il y a enregistrement de franges d'interférences en volume dans la couche sensible épaisse, procédé qui demandait d'étaler une couche de mercure sur la plaque. C'est quelque chose d'un peu difficile à faire aujourd'hui. Là encore je n'entre pas dans le détail du procédé Lippmann, qui valut le prix Nobel à son inventeur. On peut en parler bien entendu.
Lorsque le Pr. Denisuk, dans les années 1960-70, dit qu'il a suivi le procédé de Lippmann pour fabriquer ses plaques holographiques, il ne plaisante absolument pas, mais il se garde bien entendu de décrire à son éminent collègue français les trucs & astuces que lui-même et ses collaborateurs (-trices) ont peaufiné pour fabriquer leurs plaques. Beaucoup de savoir-faire secret, peu de brevets, on connaît bien cela dans une fameuse manufacture auvergnate (qui n'est pas une manufacture d'horlogerie, mais où le goût pour le savoir-faire secret est du même niveau).
Parmi les merveilles d'hologrammes russes, il y a des plaques gigantesques que j'avaies vues exposées à Paris. Les trésors de certains musées russes avaient été enregistrés sous forme d'hologrammes. Ces hologrammes ont la particularité de pouvoir être restitués en lumière blanche ponctuelle, pas besoin de laser, ce qui est un avantage considérable pour une exposition en public sur le plan de la sécurité. Je peux donner des détails au sujet de ce type d'hologramme, une merveille.
En résumé, il y a un vrai savoir-faire russe dans les surfaces sensibles photo-chimiques en général et gélatino-bromure en particulier, on se réjouit de voir ces produits trouver leur chemin vers chez nous.
Parmi tout ce que l'on peut reprocher au régime soviétique, tout en fin de liste, après les effroyables catastrophes humaines et écologiques du XXe siècle, en tout petits caractères, tout en fin de liste et à voix basse, par honte d'oser évoquer une chose futile après tant de souffrances, on peut reprocher au régime de l'URSS de ne pas avoir fait bénéficier, ni son peuple, ni les éventuels clients extérieurs, du savoir-faire de ses ouvrier(-ères), technicien(-ennes), ingéneiurs (-eures).
Une exception : la fabrique de montres "SLAVA" à B'zançon ;-)
Ah ! bien entendu, si c'était pour faire des fusées ou concevoir des matériaux à usage militaire, c'était crédit illimité, la science était valorisée au pays du "socialisme scientifique". Mais pour que les familles aient des logements et du confort (je ne dis pas : des réfrigérateurs dans un pays où il fait -30° l'hiver, mais il peut faire +30° l'été !), c'était une autre affaire.
Les hologrammes du Pr. Denysuk sont donc quelque chose totalement à part, en pleine guerre froide, une exception extravagante et admirable, on ne sait pas s'il y avait quelque application militaire par derrière, mais ce que je peux dire, c'est que les trésors des musées enregistrés sous forme d'hologramme, c'était pour qu'une exposition itinérante fasse au départ bénéficier les peuples de l'Union Soviétique de ses trésors, en transportant les objets virtuellement dans toute l'URSS ; puis dans le monde entier (il s'agit d'une image virtuelle au sens optique du terme, dans ces hologrames-là, les objets sont comme sous une vitrine).
Parmi les gestes désintéressés, totalement hors-sujet GP, on peut citer l'histoire suivante à propos de faire bénéficier le peuple de ses "trésors" nationaux : l'extravagante tournée que le pianiste virtuose Sviatoslav Richter, un soviétique de stricte obédience, fit dans toute l'URSS à la fin de sa vie.
Il décida un jour qu'il en avait marre des tournées internationales dans des grandes villes devant un public trié sur le volet, que ce soit à l'étranger ou à Moscou ou Leningrad. Il décida de faire une tournée en Sibérie dans des petites villes inconnues. L'accueil du peuple était évidemment admirable, même si le piano était désaccordé et la salle humide et froide. Le grand pianiste, après la Sibérie, prolongea cette tournée des ptites villes inconnues, humides et froides à l'étranger, et fort logiquement, il vint à B'zançon jouer les suites anglaises de Bach.
Ah ! quel souvenir !!
Parmi les savoir-faire russes dont nous bénéficions, nous avons aujourd'hui les fusées russes à Kourou, nous avons des fournitures de différents matériaux spéciaux pour l'industrie (du quartz parfait en blocs énormes à des prix compétitifs), mais aussi des loupes pour les galerie-photoïstes !
On se réjouit donc de voir aujourd'hui disponible une production russe (ou ukrainienne, ou biélorusse ... ) pour tous, qui n'est plus ni spéciale ni stratégique, qui ne demande aucune adhésion à quelque doctrine politique que ce soit, mais qui se place sur un marché libre et compétitif, celui des surfaces sensibles photo-chimiques !!!
E.B.
Modifié 3 fois. Dernière modification le 12/01/2013, 12:05 par Emmanuel Bigler (modérateur).