Bonjour Henri Peyre,
J'ai lu avec intérêt votre article sur Jonathan Wateridge et je
partage votre avis sur l'essentiel. Il faut cependant rendre justice
à d'autres artistes peintres figuratifs qui réconcilient photographie
et peinture avec le mêmes souci du détail et la même excellence
technique tel que Guillaume Bresson [
fr.wikipedia.org] qui connaît, lui aussi, un succès fulgurant (les
clients paient pour les toiles à venir). Autrement dit Wateridge
n'est pas seul, mais il fait partie d'un courant qui prend son élan
autour de 2005.
[
www.dailymotion.com]
Je souscris à vos critiques sur le travail de Wateridge, et je me
permettrais d'y ajouter quelques points :
La référence au cinéma est effectivement très pesante, mais le
problème plus général est que toute son œuvre s'origine dans les
images qui s'ancrent dans une représentation stéréotypée : le plan et
le décor de film (le motif de la piscine est un décor de Mulholland
drive de Lynch), le cadrage photographique (le vigile à terre est une
reprise presque à l'identique de Stumbling Block de Wall), la lumière
du studio photo ou cinéma. Et sur ce point Wall et surtout Lorca
diCorcia font beaucoup mieux car l'aspect "remake", inexistant chez
eux, étouffe le travail chez Wateridge par des références trop
évidentes dont la reconnaissance vire au jeu. Le travail de diCorcia
enrichi la palette de la représentation, Wateridge me semble beaucoup
plus proche de Crewdson, qui va jusqu'à utiliser comme modèle des
acteurs de cinéma et n'est pas parvenu à tuer le père Cinoche et n'y arrivera
probablement jamais. Le côté "images-grandes machines" dont
l'élaboration fait partie de la fascination et de leurs succès,
enferme leurs auteurs dans le genre "grand spectacle", ou blockbuster
pour être un peu méchant (ou gentil, selon d'où se tient la
critique); et l’on voit mal comment ces artistes vont se sortir de là. La surenchère technique et économique est de mise, rien ne les retient plus de construire un pont autoroutier pour les seuls besoins de leurs images, leur assurant du même coup une publicité et un prestige durable (sauf pour l'environnement).
Comme vous le dites, il n'y avait aucune obligation d'indexer son
travail sur l'image de cinéma, mais cette stratégie de faire une
image à partir d'images, et au final de faire une peinture sur les
images, est une stratégie postmoderne à la mode (Arles 2011 etc.). Du
coup à force de voir arriver Wateridge là où l'on l'attend, je finis
un peu par m'ennuyer, même si son travail présente un indéniable
intérêt sur l'actualité de la technique picturale ici relancée, et de
son rapport pacifié à la photographie.
Merci pour la découverte.
a+
jicé
Modifié 4 fois. Dernière modification le 01/12/2011, 10:33 par jean christian valero.