Sur le sujet du neuf en photo et en parallèle de ces notes de cours ( [
www.galerie-photo.com] ), quelques réflexions décousues :
Avec le modernisme on a l'idée du dépassement permanent, un dépassement censé condamner ce qui précédait : ce n'est pas du neuf pour du neuf, c'est du neuf pour soit-disant du progrès. Cela passe par la recherche en peinture d'une expression toujours plus contenue dans son propre matériau (le mythe de pureté du medium de Greenberg)... en fait cela répond surtout à la question : comment maintenir une peinture à laquelle la photographie a volé la représentation ?
Au lieu d'un art toujours plus virtuose, qui garde la même règle du jeu (art pompier), on change la règle du jeu en la durcissant, ce qui déclasse les prédécesseurs, qui "n'avaient rien compris"..
L'essoufflement de ces tentatives donne le post-modernisme, pour lequel au contraire on croise les medium (photo-peinture, etc.) nouveaux terrains de jeu... et on renonce à l'idée de progrès. On change donc une nouvelle fois les règles du jeu.
Ah ah, cela se précise : c'est donc devenu vraiment la grande facilité : on tente de changer les concepts et la vision du monde plutôt que d'améliorer le monde ! Si on abandonne l'idée de progrès on en arrive au neuf pour le neuf : au lieu de devenir le virtuose dans une règle, ce qui demande trop d'effort, on change la règle...
Puis on a vu arriver l'idée (dans les écoles d'art) qu'en organisant la pensée comme dans les sciences on arriverait, ratissant le terrain, à dénicher les arpents de terre créative qui n'avaient pas encore connu le soc : le métier devient pour le coup vraiment le changement de la règle. La créativité est devenue une superficie, une matière première qu'on extrait d'un champ qu'on arpente. Probablement on commence là vraiment à confondre définitivement le neuf avec la création.
Mon opinion :
Le talent n'est probablement pas de faire du neuf mais de trouver une alliance parfaite entre l'idée, la forme et l'efficacité de l'envoi. Trouver cette alliance est extrêmement difficile et peu y arrivent, en quelque domaine que ce soit. C'est ce qui donne aux rares apparitions de choses vraiment réussies l'apparence du jamais vu et une sorte de nouveauté radicale, qui vient de la simplicité évidente de l'objet parfait et de la rareté de ce genre d'apparition.
S'il faut se taper tout un catéchisme de règles laborieuses et un vocabulaire inconnu pour accéder à des émotions aussi singulières, la jouissance est toujours moins grande.
Les scientifiques le savent bien, tout à la recherche de règles plus simples et d'énoncés plus généralistes.
Non ce qui nous manque ce n'est pas le neuf. Le neuf on en a au-delà de ce qu'on désire. Il nous manque bien plutôt quelque chose de très simple et de très rare qu'on a pu appeler, faute peut-être d'autre mot, la beauté !