C'est pour cela que EB nous posait plutôt une question sur l'ennui que provoque la pratique numérique
J'ai volontairement laissé la question initiale, la proposition N°0, comme très floue et caricaturale.
Mais à ce stade de la discussion, je vois qu'on ne peut pas évacuer directement d'un revers de main rageur la contribution N°1 sur le côté lisse donc ennuyeux de l'image numérique.
Ceci étant dit il serait temps au message N°83 que je me prononce personnellement ! l'image numérique ennuyeuse, c'est donc une formule lapidaire transcrite après avoir laissé traîner l'oreille dans de nombreuses discussions entre galerie-photoïstes.
Le débat précédent a permis de préciser un certain nombre de points, et j'en suis très heureux.
Sur la contribution N°1 : image trop lisse, je ne suis pas sensible, pour des raisons personnelles ; j'ai été propulsé vers la photo moyen format à un moment ou, étudiant en thèse, je manipulais des plaques haute résolution dont le grain était invisible avec un microscope ordinaire... et je ne me suis pas encore remis du choc provoqué par mes premiers tirages d'après AGFAPAN 25, enregistré derrière le tessar de mon flex-bi. Mais comme je ne prenais que des images type amateur-soleil-brillant-dans-le-dos, 100% cadré en dynamique pour passer dans une bonne norme-ISO-des-familles, je n'ai jamais senti le besoin de passer à la TRI-X ou à la HP5 : mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. Néanmoins il me reste de ces débuts une indifférence vis à vis de ce qu'est un gros grain « créatif » ; pour moi le gros grain est le prix à payer pour la sensibilité, mais comme par ailleurs je n'utilisais presque que du Kodachrome 25 pour la plupart de mes photos de loisirs en pleine nature, il y avait très peu de chances que les grains, si beaux soit-ils, des films N&B « rapides » me tentent.
Concernant la pratique, je vois que les collectionneurs d'outils photographiques qui nous lisent ont eu peur de se faire f... de leur g... en revendiquant publiquement leur sympathie pour la contribution N°2.
Comme dirait Laurent Gerra :
eh bien moi, je vais vous le dire, je me trouve en parfaite résonance avec la proposition N°2, de même que la messe sans latin était emm.... pour Brassens, de même la foto sans manipulation et sans tout mon petit bazar depuis les molettes & les loupes pliables de la prise de vue, le léchage soigneux de la bande gommée du film 120, jusqu'à la pince dans la cuvette, me semble ennuyeuse (** NOTE 1).
Changer d'appareil sans arrêt, au hasard et sans projet photographique précis, c'est le plaisir du collectionneur, cela brise très certainement l'ennui de la pratique de l'appareil numérique auto-tout, parce qu'il faut avec les appareil classiques dont on change sans arrêt, à chaque fois, se remémorer où sont les boutons & autres molettes ; c'est évidemment la catastrophe si on veut un boulot suivi et reproductible pour les clients... n'en rajoutons pas.
Concernant la proposition N°3, exprimée à Nancy Par Philippe O., que je salue au passage, j'y souscris avec quelques réserves.
À mes yeux, l'imagerie numérique, donc le matos et les techniques de production d'images numériques pour les amateurs ou les professionnels, sont un prolongement du très haut degré d'automatisation qui était déjà celui de la photo à film à la fin du siècle dernier.
Donc le passage à l'imagerie numérique, grand public ou professionnelle, accentue, certes, le bombardement d'images ennuyeuses, mais cela existait déjà auparavant.
C'est un débat qui n'est pas simple, de savoir s'il y a rupture ou pas entre la production sur film de la fin du XX-ième siècle et la sur-production actuelle d'images numériques...
Concernant la proposition N°4, exprimée dimanche dernier à Nancy par Philippe M., que je salue également au passage, je ne peux pas l'exprimer de la même façon, n'étant pas tenu de produire des images avec une contrainte aussi forte que les photographes professionnels ; mais je dirais, ce qui revient au même, qu'étant devant un ordinateur un grand nombre d'heures pour le boulot, j'apprécie pendant les loisirs de pouvoir faire de la photo sans électronique et sans ordinateur.
Quel plaisir de pouvoir, par exemple, regarder des diapos moyen format sur ma fenêtre comme un petit vitrail de Chartres, en plus petit, certes, mais en plus intime et en plus laîc mais tout aussi émouvant ; et que rien n'égale, pour ce qui est d'une image « opaque, en réflexion », la tenue en mains d'un tirage qu'on a fait soi-même à l'agrandisseur et en cuvettes.
(** NOTE 1) Impossible de ne pas se remémorer de petit poème
holorime d'Alphonse Allais :
Ah ! Vois au Pont du Loing !
De là, vogue en mer, Dante !
Hâve oiseau, pondu loin
de la vogue ennuyeuse...
Alphonse Allais ajoutait :
la rime n'est pas très riche, mais il vaut mieux cela que la trivialité
E.B.
Modifié 1 fois. Dernière modification le 21/04/2010, 11:15 par Emmanuel Bigler.