Parmi les nombreux livres de photographie commandés et reçus ce mois-ci, trois sont composés de photos réalisées à la chambre 8x10". J’ai écrit quelques mots de présentation rapide sur le premier, celui de Yaakov Israel. Le second, publié il y a un an en 2011 ne doit pas être inconnu à beaucoup ici, et tout particulièrement aux gens du Nord : « Terrils » de Naoya Hatakeyama, publié chez Light Motiv, un très bon éditeur de la région.

D’abord, je suis un grand admirateur du travail d’Hatakeyama, que je tiens pour un des très grands photographes japonais. Terrils est le fruit d’une résidence dans le Nord de la France. On va retrouver un certain nombre de thèmes et la manière d’aborder les choses d’Hatakeyama : le lien avec les hommes, la modification des paysages, une dimension quasi-mythologique parfois. On va bien entendu retrouver des liens avec ses autres livres. Ce qui frappe, c’est que, utilisant les qualités propres du format 8x10", le photographe ne se perd jamais dans l’éther, il garde toujours les pieds sur terre, il n’oublie jamais le travail des hommes, il a toujours une approche du monde précise et presque scientifique.

On va donc retrouver dans Terrils les thèmes d’autres livres somptueux, ses explosions ou Ciel tombé par exemple. Terrils n’est peut-être pas le tout meilleur de ses livres, il n’a pas la puissance de certains d’entre eux (c’est, je m’avance peut-être et ça ne va pas forcément plaire :-) souvent une des caractéristiques des travaux en résidence), mais c’est néanmoins un livre magnifique, pour ne pas dire une petite splendeur.

On voyage dans beaucoup dans ce livre aux très belles lumières - dira-t-on assez la beauté des lumières du nord -, qui rappelle d’autres photographies d’autres endroits du monde. On est en même temps dans le regard attentif à l’histoire récente, à la transformation du paysage, au territoire (l’effet résidence :-)) et en même temps, certaines images nous emmènent plus haut en évoquant la mythologie.

Regardant ce matin Les 36 vues du Mont Fuji de Hokusai, on me pardonnera de jouer le mauvais critique d’art et faire de l’esthétique de troisième zone, mais je ne peux pas m’empêcher de voir un parallèle - certes hasardeux :-) - entre ces cônes quasi-parfaits que sont les terrils et les estampes de paysage du vieil artiste dans lesquelles le Fuji n’apparaît parfois que minuscule, en arrière-plan, les travaux des hommes occupant eux l’avant-plan. Dans les photographies d’Hatakeyama, l’eau occupe très souvent le premier plan : en chinois, « paysage » est composé des mots « montagne » et « eau ». Bon, c’est juste écrit comme ça, hein, pour ce que ça vaut.

Une autre question qu’on retrouve parfois chez Hatakeyama, c’est la question de quoi photographier. Question centrale du superbe livre Kesengawa réalisé après le tremblement de terre et le tsunami de 2011 qui ont d’autant plus touché le photographe qu’ils ont frappé sa région natale.

Hatakeyama est un des photographes les plus intéressants qui soient à lire et à écouter : faites une recherche, lisez ses articles et ses entretiens, écoutez-le parler. Je ne me lasse pas de cette parole et de ce regard calme et malicieux en même temps. Terrils contient en son centre un court et beau texte sur le travail dans le Nord du photographe : ne faites pas comme la plupart des mes copains qui ne lisent pas les textes des livres de photo, si vous achetez ce livre, lisez ce joli petit texte.

Le courant semble être très bien passé entre Eric Le Brun, l’éditeur, et le photographe puiqu’un nouveau livre est prévu à l’automne, une version française retravaillée de Kesengawa, jusqu’alors uniquement disponible en version japonaise. A noter aussi que mon contact avec l’interlocutrice de Light Motiv, Elodie, a été absolument excellent, un vrai plaisir.

L’impression du livre est excellente

Terrils de Naoya Hayatekama, Light Motiv éditeur, 25 x 30 cm, 98 pp, texte trilingue français-anglais-japonais, 4000 exemplaires. ISBN 9782953790818. 35 €. Disponible directement chez l’éditeur, en librairie et en ligne. Il existe une version japonaise éditée par la galerie d’Hatakeyama.

Jimmy



Modifié 4 fois. Dernière modification le 23/12/2012, 13:28 par Jimmy Péguet.

Bonsoir,
j'ai commandé le livre, il est en rupture sur Amazon. A suivre, en tout cas merci pour ton article, Alain.

Alain Gillet
Mon site

Il est disponible directement sans frais de port chez l'éditeur en écrivant à edition@lightmotiv.com ou à light@lightmotiv.com

[www.lightmotiv.com]

Jimmy

Elodie Collet m'envoie ce lien de Mediapart avec un portfolio de photos de bonne taille de Terrils.

Jimmy

Le livre sur les terrils du Nord/pas-de-Calais est très beau.
Je l'avais vu en vente à la librairie installée au Tri postal de Lille lors de l'expo Lille 3000 fantastic.
(l'expo est visible jusqu'au 13 janvier 2013)

Merci Jimmy, j'hésitai et votre prose à eu raison de mon porte feuille,ceci dit franchement c'est pas le prix
pour un livre de cette qualité.
De plus cette maison d'édition dont Aurélie Collet,sont vraiment sympa.Je crois que je vais craquer pour le livre Docker,j'aime l'image.
En attendant je viens juste de me plonger dans Terrils et à part quelques double pages, mais c'est toujours le même problème,qui m'énerve un peu, les photos sont superbes et belles impressions.
Je regrette de ne pouvoir trouver d'autres photographes Japonais édité ici, j'aime leur manière de sortir
d'un certain académisme photographique d'une manière tout à fait naturelle.
Eric

Bonjour Jimmy,


Je trouve son travail bien moins intéressant que celui de Shibata, qui d'ailleurs à fait ses études de photographie à Gand en Belgique dans les années 70. Sugimoto & Shibata non seulement utilisent la 8x10 mais font partie de la première ligue mondiale en photographie.
Désolé mais le travail de Hatakeyama est très très loin de la.

Bien à toi.

roger

Pour remettre Hatakeyama au niveau de Shibata... voir son livre de 2000 :

Hatakeyama Naoya - Underground


[www.lagalerie.de]


[www.lagalerie.de]



Modifié 1 fois. Dernière modification le 21/01/2013, 12:37 par David.G..

Malheureusement on ne voit à peu près rien sur les images du lien de David. Des recherches sur Underground, Ciel tombé ou Blast renvoient de meilleures reproductions.

Pour Roger, s'il lit, j'avais écrit que si j'aimais Terrils, ce n'était à mon sens pas son meilleur livre. En passant, ... un des très grands photographes est pompier, j'aurais plutôt dû écrire ... un des photographes les plus intéressants :-).

Jimmy

[www.prixpictet.com]