Auteur: CharlesT
Date: 23-08-2007 09:14
Quelques réactions:
1) "Toute photo (image) est porteuse d'informations qui font sens pour quelqu'un ou quelques uns. L'image n'est-elle pas, par essence, une auberge espagnole ?"
C'est une apologie de la non-volonté. Est-ce qu'une photo prise de manière aléatoire porte des informations? Oui bien sûr, du moment que l'exposition a laissé quelques vestiges sur l'émulsion. Mais le résultat n'est pas voulue par l'artiste; dès lors est-ce une oeuvre d'art?
2) "Et même si ces informations ne sont que latentes ou virtuelles : le "Grand art," c'est bien de donner à voir l'invisible, non ?
Oui, ou plutôt c'est, selon moi, la manière de donner à voir l'invisible, le caché, le secret, l'indicible... (qui existe bel et bien pour ceux à qui manquent les mots :-)
Une manière trop appuyée, un style un peu lourd, un sens univoque trop évident, et la photographie bascule dans le mièvre, l'emphase, ou la vulgarité."
LE problème que je vois, c'est qu'au fur et à mesure qu'on apprend, qu'on accroît sa sensibilité esthétique-artistique, on perçoit de plus en plus aisément la dose d'artifice: la manière et le style. Donc, dans notre progression, on appuie ou on alourdit de moins en moins, jusqu'au beau jour où on se retrouve sans manière, ni style, et ce jour-là, on devient "un Grand Artiste". Le problème, c'est que le Grand Artiste et quelques-uns de ses proches verront l'apport artificiel et complimenteront la subtilité du travail. Mais pour la grande majorité, la photo ne contiendra rien d'intéressant (donc aucun signe non plus). Pour moi, la photo de Shore mentionnée ici tombe dans cette catégorie: elle montre une réaction, mais aucune action. De plus, elle aurait pu aussi bien être prise par un photographe juvénile, qui n'a pas encore développé une manière ou un style univoques. C'est marrant comment on commence avec tout, on travaille, puis on finit avec rien.
3) "Le photographe de carte postale (j'ai travaillé dans ma jeunesse avec un professionnel de la chose) cherche à faire des photographies qui plaisent... d'où l'éventuelle connotation péjorative."
Il ne faut pas interdire le plaisir. L'art ne fait pas toujours dans le sérieux. Faut savoir être simple aussi.
4) Paysage et mémoire: excellent, je connaissais pas et je vais aller voir. On apprend tous les jours. Merci Marzin.
Pour moi, le lieu est avant tout passif: le lieu ne me parle pas, je l'écoute, je le regarde, je le sens. J'y réagis car je le veux. Parfois, ce que je perçois entre en résonance avec mon mélange de connaissances subjectives et objectives. Personnellement, je ne pense pas que ce soit uniquement l'histoire culturelle d'un lieu qui m'intéresse. Je ne suis pas obligé de connaître son histoire humaine (si elle existe!), pour qu'elle entre en résonance, qu'elle me rappelle quelquechose en moi.
Bien que le moment de résonance soit magique, il est rare que ce soit cette magie que je photographie. Comme déjà dit par d'autres ici, je travaille souvent avec les objets secondaires du lieu pour former une image, dans l'espoir qu'une fois transcrite, elle donnera une photo représentative du lieu ou de ma réaction à ce lieu. Mais la photo ne se substitue pas au lieu: elle l'évoque au plus. Seul le photographe sait exactement ce qu'elle évoque. Les autres n'ont qu'à deviner. Dès lors, je pense qu'il faut s'attacher avant tout à rendre une photo qui parlera d'elle-même, qui laissera au spectateur (qui peut être le moi avenir) une émotion. La photo n'a pas besoin de parler directement du lieu. Un lieu digne dêtre photographié est un lieu qui donnera une photographie chargée de sens.
Charles
http://www.chtwist.com
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