Auteur: Gabriel83
Date: 23-05-2007 13:10
Bonjour Jean-Louis,
Je ne pensais pas susciter autant de polémique avec cette phrase, écrite, dois-je l'avouer, sur un ton léger. Il va de soi que l'impératif de résultat, la qualité de la prise de vues, la technique n'ont que peu à voir avec le regard que l'Autre va porter sur le matériel que l'on utilise. On est sûrement un certain nombre, ici, à avoir un peu de "bouteille", et à se soucier peu de cet autre et son regard, qu'il soit jaloux, orgueilleux, qu'il prenne des airs supérieurs ou je ne sais quoi.
Le sens de cette question, aura visiblement été mal compris, et amené bien des réactions, des plus constructives, comme la vôtre, aux plus triviales, voire insultantes. Cela dit, la question reste posée et vous m'avez apporté quelques élèments de réponse.
Je vais tâcher de la poser autrement, en prenant soin de considérer cette distinction que vous faisiez dès le début de votre message : à une époque où l'image que l'on renvoie de soi compte dans la relation que l'on entretient avec autrui, même si, acceptons-le, les choses vont en s'améliorant, l'indépendance de goût, la différence, devenant des qualités en vogue, peut-on être considéré comme il se doit quand on n'est pas à la pointe du progrès?
Pour vous donner les clés de mon raisonnement, reprenons les éléments les uns après les autres. Vous verrez que cette question n'était pas si absurde qu'elle en avait l'air.
- Pour répondre à votre interrogation initiale, il va de soi que l'on ne considèrera, ici, que la relation professionnelle. Ca n'aurait aucune espèce d'importance dans le cadre d'une utilisation personnelle, amatrice.
- Comme vous le souligniez aussi, le client n'est pas un gogo, certes, mais il est un homme, vivant dans ce même monde et soumis aux mêmes lois, parfois idiotes, qui régissent les relations humaines
- Le photographe est un homme de l'image et de ce fait, aucun de vous ne mettrait en doute cette proposition : l'image est porteuse de sens, de style. L'image véhicule des idées, des points de vues, des manières de voir. L'image séduit, rebute, indiffère, mais en tous les cas, elle influe sur celui qui la voit, surtout quand il est client et qu'il se voit payer une prestation. Donc, l'image, et même l'image que l'on renvoit, importe.
- Le numérique devient compétitif : entendons par là qu'il y a de moins en moins de différences qualitatives entre une prise de vues en numériques et un plan film scanné (l'écart diminue, et même, le numérique prend le dessus, en terme de résultats, sur l'argentique). Et, élément non négligeable, on a aussi moins de chances de perdre ses photos à cause d'un développement foiré, d'une fuite de lumière... ou même de faire des photos dans le vent parce que le film se sera mal enclenché, ou bien qu'on aura même oulié d'en charger un (ne rigolez pas, j'ai déjà vu ça!).
- Le matériel, en photographie, compte! Vous notiez vous-même qu'un photographe équipé d'une chambre gagnerait sûrement en crédibilité, dans l'imaginaire collectif ("tiens, un gars qui travaille à l'ancienne et qui a sûrement de l'expérience"). Et puis, si ça ne comptait pas, il suffirait d'être équipé d'un appareil jetable ou d'un appareil numérique grand comme un timbre poste pour être considéré comme un professionnel (et l'on ne parle pas ici des résultats, hein, mais seulement de l'impression que cet autre, face auquel on se présente, aura). Or, on sait tous que toute personne s'intéressant un minimum à la discipline (et ils sont nombreux depuis les années 80 et l'accès du grand public à cet art, et d'autant plus encore depuis 2002 avec le développement du numérique à vitesse grand V) connaît à peu près ce qui existe, ce qui se fait et arrive a se faire une idée, même vague de ce qui est accessible, en terme d'équipement, et ce qui l'est moins. Mais en plus, toute personne ayant déjà travaillé avec des photographes pro sait à quoi ressemble le matériel pro, sait à peu près ce qui est réalisable, etc...
On ne gagne pas de marché avec un polaroïd!
Ca provoquera peut-être encore des réactions, mais, la question n'était pas si futile qu'elle en avait l'air. En effet, si l'on se fait une idée des qualités professionnelles d'un photographe à la vue de son matériel, que l'on est comparé à d'autres, proposant du tout numérique à 12, 16 ou 39 mégapixels pendant qu'on est encore avec son (même remarquable) Canon EOS3, 1V ou son Nikon F5 et que l'on perd les marché à cause de ce simple fait, est ce que ça veut le coup de rester en argentique? Est ce que l'impression que l'on renvoit ne nous dessert pas?
Si je m'interroge et vous questionne à ce propos, c'est essentiellement pour savoir si certains d'entre vous travaillant en argentique se sont vu perdre des marchés au profit d'un autre travaillant avec du matériel plus moderne, paraissant peut-être plus crédible aux yeux d'un client.
Un certain nombre d'entre vous me raillait, pensant que je m'attardait sur des détails... Je suis aussi le genre de professionnel qui a recommencé à gagner des contrats depuis qu'il à mis à la corbeille ses jeans et ses baskets pour démarcher en costume de marque et chaussures bien cirées, et qui a regagné la confiance des clients en s'équipant d'un joli Mac.
L'image ne compte pas... vous en êtes sûr?
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