Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 08-09-2005 18:22
Il me semble que pour les bascules et décentrements il faut distinguer une définition géométrique sur l'épure du système d'une définition mécanique qui explique comment en pratique on réalise différents mouvements.
Restreignons d'abord le propos aux systèmes habituels, centrés, à symétrie de révolution autour d'un axe optique (on met de coté les anamorphoseurs pour l'instant ;-)
Les ingénieurs depuis le XIX-ième siècle se décarcassent pour que l'image d'objets lointains se forme le plus près possible d'un plan, le fameux plan focal qui n'est "plan" qu'au voisinage de l'axe, mais ce plan est perpendiculaire à l'axe optique. S'il y a de la courbure de champ, la surface courbe de meilleure focalisation est de révolution autour de l'axe optique ; et la plupart du temps ce n'est pas un cône, plutôt un truc assez plat au voisinage du foyer ;-)
Si on cherche à représenter une portion d'espace quelconque par projection optique sur un plan à travers un objectif, il n'est pas en général nécessaire que ce plan soit perpendiculaire à l'axe optique, sauf si on veut une image nette de l'infini (ce qui est légitime), mais des contraintes de netteté et de rendu de perspectives imposent quelques règles importantes comme la règle de Scheimpflug pour la netteté (règle 'physique') ou d'autres règles concernant le rendu des fuyantes et des volumes (plutôt des règles esthétiques). Il y a également la question du placement de l'appareil qui conditionne le point de vue donc la perspective indépendamment des mouvements.
Tout cela pour dire qu'il est au départ assez légitime pour les simples mortels qui ne connaissent que les détecteurs d'images plans de placer pour commencer ce plan au voisinage du foyer et perpendiculaire à l'axe optique pour avoir une image nette d'objets lointains, mais qu'ensuite on a toute liberté pour faire un peu ce qu'on veut.
On dira donc qu'il y a bascule dès que le détecteur supposé plan n'est plus perpendiculaire à l'axe optique.
La notion de décentrement suppose que l'image est détectée sur une surface plus petite que le cercle d'image nette de l'objectif, en général c'est un rectangle dont l'intersection des diagonales définit un centre du format, il y aura décentrement dès que l'axe optique ne perce plus le centre du format.
Dans le cas où il y a dejà une bascule, l'intersection du plan du détecteur avec le cône de lumière derrière l'objectif donne une ellipse d'image nette, dans cette ellipse dont on peut définir un centre, on placera un rectangle à volonté par un décentrement. Dans ces conditions l'interprétation des images est plus délicate ne serait-ce que dans le cas des très fortes bascules, l'image est déformée et devient de luminosité très inhomogène. On peut en revanche facilement imaginer une bascule sans décentrement si on tourne le plan du film autour d'un axe de rotation qui coupe l'axe optique.
Après la géométrie, la mécanique.
Les bascules et décentrements, pour le photographe, ce sont les glissières, axes, rotules, etc... qui permettent de réaliser bascules et décentrements géométriques. La correspondance entre les mouvements mécaniques et les bascules / décentrements géométriques est parfois confuse, il est en général admis que les chambres monorail à mouvements avant/arrière indépendants sont les plus lisibles.
Chaque corps de chambre avant arrière est un solide à 6 degrés de liberté dans l'espace, 3 translations, 3 rotations. Sur le corps avant d'une chambre on trouvera une translation longitudinale qui sert à la mise au point, deux translations haut/bas droite/gauche pour les décentrements, deux axes de rotation d'axe vertical et horizontal pour les bascules. reste le degré de liberté de rotation autour de l'axe optique ; optiquement il ne sert à rien et n'existe en général pas, mais en pratique il peut être parfois utile de tourner la planchette ce qui ne change rien optiquement. à l'arrière, même mouvements qu'à l'avant, certaines chambres ont un dos tournant qui corespond au troisième degré de liberté de rotation autour de la perpendiculaire au dépoli.
Certaines combinaisons de mouvements mécaniques sont redondantes ou équivalentes ; la combinaison de deux bascules de même angle et d'axes parallèles à l'avant et à l'arrière équivaut à un décentrement indirect. Ce faisant on réalise plus qu'une simple translation sauf si on tord le rail pour remettre l'axe optique pointant vers le sujet de départ.
Enfin les mouvements des chambres seront plus facilement présentés par leurs effets dans des images comme on en voit dans tous les cours classiques. Quelques exemples mouvements : le décentrement vertical en architecture, le décentrement latéral pour certaines prises de vue (miroir pour un catalogue, façade vue de côté pour éviter un réverbère...) et la bascule avant d'axe horizontal pour étendre la zône de netteté au sens de Scheimpflug.
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