Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 08-06-2005 11:09
Qu'est-ce que c'est un film "ortho" ?
Si on repart des plaques gélatino-bromure du XIX-ième siècle, ces supports ne sont sensibles qu'au proche UV et au bleu. D'où un résultat parfois catastrophique. On dit que ces supports argentiques sont non chromatisés. Pour voir à quoi cela peut ressembler, il suffit d'utiliser un papier sensible à grade fixe comme détecteur dans une chambre et de photographier ne serait-ce qu'un paysage d'été avec ciel de nuages... sans parler de mettre des oranges dans le champ.
L'oeil humain a un maximum de sensibilité dans le jaune, vers 550-600 nm, pas dans le bleu, donc l'échelle de gris enregistrée à partir de plages colorées par une plaque ou un film non chromatisés diffère totalement de ce que l'oeil "voit".
Le problème est donc d'étendre la sensibilité chromatique du support vers les plus grandes longueurs d'onde du spectre. Ce problème se pose à l'envers avec les capteurs silicium qui ont un maximum de sensibilité dans le proche infra-rouge, mais qui restent très sensibles dans le bleu.
Un premier progrès a été réalisé, je ne sais pas quand, sans doute au tournant des XIX-ième et XX-ième siècles, disons que c'était disponible entre les deux guerres mondiales, sous la forme des films orthochromatiques qui, comme leur nom l'indique, avaient l'ambition de restituer une gamme de gris plus conforme à ce que l'oil voit grâce à une extension de sensibilité dans le vert ; les films ortho restent plus ou moins aveugles dans le rouge. On développait autrefois ces films par inspection en lumière rouge.
Les films panchromatiques étendent la sensibilité vers le rouge mais on aime parfois recentrer cette sensibilité sur le jaune par filtrage toujours à cause de l'oeil humain.
Les films ortho existent actuellement, peut-être chez MACO en ont-ils en bobines 135 et 120, sinon ce film existe à modelé continu en plan films chez Bergger et chez Ilford pour servir d'internégatif dans les procédés photochimiques divers & variés, ou pour faire des diapos noir et blanc par contretype. Il existait un film Agfaortho 25 à granularité extrêmement fine mais à fort contraste pour la copie de documents au trait, un métier disparu à l'ère du scanner et de la photocopieuse.
Donc par rapport aux films panchro modernes, le film ortho n'est pas "ortho" du tout au sens où il fausse encore pas mal la gamme de gris !!
Mais dans les années trente, c'était un progrès considérable, on lui associait déjà le filtre jaune pour les vues de paysage avec nuages, cela passait bien.
La raison pour laquelle les films ortho ont un grain et un pouvoir résolvant plus élevé que certains panchro me semble assez obscure dans la mesure où il existe des films panchromatiques à grain ultra-fin comme le défunt Technical Pan® de chez Kodak ou le Gigabit® allemand, ce dernier étant crédité en résolution de performances supérieures à l'ancien Agfa Ortho 25.
De la même façon en remontant aux plaques haute résolution, les légendaires Kodak 649-F étaient des plaques pour spectroscopie et donc étaient panchromatiques. On les utilisait pour des hologrammes avec les lasers rouges qui étaient les seuls disponibles dans les années 60-70. Nénanmoins il existait des plaques HR type 1A chez Kodak, très proches des 649F en performance mais non chromatisées ce qui les rendait plus faciles à manipuler. Pour fixer les idées nous parlons ici de supports argentiques capables de passer plus de 500 pl/mm. Un autre film célèbre de chez Agfa-Gevaert disponible en bobine de 70mmde large, utilisé pour les hologrammes était parfaitement sensible dans le rouge tout en passant allègrement les 1000 pl/mm.
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