Auteur: Jimmy Péguet
Date: 12-03-2005 21:25
Je me suis replongé dans la petite plaquette "Campagnes châtelleraudaises" que Claude m'avait envoyé (Claude, si par hasard tu lis ceci, j'ai totalement laissé passer la réponse que je voulais te faire. Ooops). Pas beaucoup de photos, mais c'est mieux que des reproductions éparses sur écran, on est plus près du projet, on voit mieux la démarche.
J’étais un peu loin au début. J’ai commencé par me dire « Encore un inventaire. C’est froid, plat, sans vie ». Puis il se passe d’autres choses. On connaît ces lieux, ces rues de villages, ces champs, ces pavillons, ces jardins à côté desquels on passe en voiture quand on roule, la tête un peu ailleurs. Tout est équilibré, détaillé. L’air bouge doucement. On connaît, et on n’a en même temps jamais vraiment regardé et cadré de cette façon précise, sans rien de spectaculaire, sans rien à voir d’abord. On est un tout petit peu décalé. La petite préface parle « de vie étroite et sans danger… de bonheur possible à condition de le mesurer, de réduire le rêve au peu… ». C’est étouffant, et pourtant on trouve de l’air au bout d’un moment, peut-être parce que ça parle de ce qu’on connaît, de la campagne profonde qu’on connaît depuis longtemps, peut-être parce que ces photos en fait ne sont pas fixes, qu’elles changent tout le temps, très légèrement. A moins que ce ne soit mon œil ou mon cerveau qui y rajoutent des choses, qui y déversent des rêves, qui écoutent les bruits feutrés de Saint-Sauveur, 93 m d’altitude, à un moment où aucune voiture ne passe sur la route. L’esprit s’envole. J’ai mis un moment, mais ces photos ne m’ont jamais vraiment quitté depuis que j’ai reçu la plaquette, et c’est depuis quelques jours seulement que je les vois bien. Peut-être, Charles, parce que le support papier et une construction différente leur va mieux. Ou peut-être parce qu'il faut parfois attendre. Peut-être parce que "l'émotion" (c'est quoi, l'émotion dont on se sent toujours obligé de parler dès qu'il est question de photo ?) ne se livre pas tout de suite, qu'il faut faire un effort de réflexion.
Et puis je me rends compte aussi qu’elles sont dans la lignée des photos noir et blanc de Claude que je connais et que j’aime. Sans plus rien de spectaculaire, avec toujours la présence de la route pas loin (« Bordures » - avec textes de Kenneth White, c’est limite malhonnête, comment résister à un bouquin qui contient du Kenneth White ? – était une histoire de route, « Convoi vers l’est, et retour » un autre voyage).
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