Auteur: Nicolas Marailhac
Date: 02-01-2005 17:49
Bonjour,
Je n'ai rien à ajouter à ce qui a été dit plus haut, je rejoins tout à fait Chung-Leng, Frédéric, Mats et Pierre.
J'ajouterais juste une réflexion qui est née alors que je regardais deux vidéos de Rineke Dijkstra. Je précise d'emblée que je ne suis pas allé voir la vidéo de 26 minutes de la série Contacts, pour tout un tas de raison, l'une d'elles étant que je pense que cette vidéo est différente du reste ne serait-ce que parce que la photographe prend la parole.
Le travail photographique me touche très simplement, car l'approche des sujets par la photographe est très simple, il en résulte une grande liberté de lecture, liberté qui préserve celle des sujets même au sein de travaux en série, liberté qui préserve celle du spectateur que je peux être. À aucun moment je ne sens l'acuité d'un regard par trop critique ou par trop condescendant de la photographe. Juste un questionnement simple et honnête. En un sens, un travail qui, en plus de pleins d'autres points de différences, propose un portrait de certaines personnes avec le retrait que l'on ne trouverait pas dans les portraits de Richard Avedon le long de In the American West dont on a, à plusieurs reprises, longuement parlé ici. Je ne me sens pas, ni ne sens le sujet, prisonnier ou contraint de quelque manière que ce soit.
À cet égard, cette liberté qui nous est laissée permet toutes les lectures: je sais que certains spectateurs ne partagent absolument pas le point de vue général, assez enthousiaste, exprimé sur ce post! Et je dirais qu'en ce sens, la photographe réussit un travail très habile.
Par contre, ce qui a été étrange pour moi, c'est que cet espace de liberté s'est complètement évaporé des vidéos. Il y en a deux, une petite présentée sur un écran (où l'on suit une jeune fille chanter un morceau de variété comme on en entend des décibels à la télévision ou à la radio), assez discrète, puis une plus grande installation (où, sur deux écrans, on voit des adolescents danser, ou simplement se tenir face à la caméra, en coulisse d'une boîte ou d'une fête, le fond sonore étant celui des rythmes musicaux d'une boîte de nuit).
Évidemment, la gêne des sujets est palpable: d'abord, la caméra est bien plus proche que l'appareil photographique, ensuite on voit la gêne qui est absente des photographies, ou qui nous est épargnée peut-être. Ensuite, bien sûr, le temps fait son œuvre: je suis gêné, le sujet n'est pas franchement à l'aise (ou, parfois, il est très joueur face à la caméra), et le temps accentue cela.
Bien sûr, beaucoup des portraits de Rineke Dijkstra laissent transparaître une gêne de la part du sujet ou des modèles. Mais elle me semble bien plus simple, plus naturelle, moins lourde. Je pense qu'on ne se prépare pas de la même manière à être filmé qu'à être photographié: il n'y a aucune rémission en vidéo.
Je ne sais pas de quelle manière ce travail s'insère ou se juxtapose aux images de Rineke Dijkstra. Mais, pour moi, et j'aimerais bien savoir ce que vous avez pu en penser, il y a une espèce de lourdeur qui tout d'abord m'ennuie (dans le sens où elle ternit la relation que j'ai avec les images photographiques), qu'ensuite j'essaie d'oublier pour ne garder en mémoire que les images fixes.
Et vous?
N
|
|