Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 04-11-2004 23:44
Je pense qu'il faut absolument réserver le mot "vignettage" à une perte accidentelle
de lumière due à quelque chose d'extérieur à l'objectif. Par exemple un pare-soleil
mal conçu ou une "vignette", carton percé d'un trou souvent ovale utilisé autrefois pour les portraits classiques à bords dégradés.
La décroissance de l'éclairement au niveau de l'image, dans une optique grand angulaire, à l'intérieur du champ de pleine lumière (voir définition pratique plus bas) est un phénomène naturel dû aux raisons expliquées par Michel, auxquelles il faut ajouter la diminution de surface apparente (surface vue selon la ligne de viée, un cercle se projette comme un ellipse aplatie) de la pupille de sortie vue par un coin du format-image. Pour un grand angulaire de chambre classique quasi-symétrique la pupille de sortie se trouve au niveau du plan principal image soit à une distance focale en avant du film (en réglage de netteté infini->foyer).
Le modèle le plus simple qui considère que la pupille de sortie se comporte comme un trou rond percé dans un écran plan et fixe, donne une distribution en cos^4(theta), theta étant l'angle entre l'axe optique et la ligne qui joint le centre de la pupille de sortie au point du film où on regarde l'éclairement. Ce modèle en cos^4(theta) représente bien ce qui se passe avec une optique d'agrandisseur.
La réponse à la question de Cinto est donc simple, il suffit de retrouver les caractéristiques de l'objectif convoité. S'il est au catalogue, les bons fabricants donnent les courbes de décroissance de la lumière pour toutes leurs optiques et pour différents diaphragmes.
Les ingénieurs opticiens se décarcassent depuis des décennies pour endiguer cette perte d'éclairement ; comme ils ne peuvent rien à l'augmentation de la distance entre le centre de la pupille de sortie (image de l'iris vue de l'arrière) et les bords du film, ils ont trouvé une astuce géniale qu'on appelle "distorsion pupillaire" qui fait "grossir" la pupille lorsqu'on la regarde depuis le coin. Du coup la perte est moindre que si la pupille se comportait comme un simple trou circulaire percé dans une plaque plane, vu du coin cette pupille s'aplatit comme une ellipse.
Dans une optique grand angulaire, le champ de pleine lumière et le diamètre d'image nette (qui sont très voisins dans une optique moderne) augmentent lorsqu'on diaphragme, mais la perte de lumière "naturelle" à l'intérieur du champ de pleine lumière, pour autant que je le sache est effectivement un peu influencée par la fermeture du diaphragme, voir les courbes des constructeurs, mais la décroissance reste incontournable même à l'ouverture de travail recommandée.
C'est une question délicate où je ne m'avance pas trop, c'est pour pour Fabrice-le-concepteur d'objectifs.
En pratique l'ouverture maxi d'une optique de chambre n'est utilisée que pour la mise au point, donc la distribution d'éclairement, un peu différente entre entre un 4,5 et un 6,8 n'est pas en principe visible sur l'image finale qui sera prise à 16 ou 22.
Définition pratique du champ de plein lumière : vous regardez la pupille de sortie depuis le niveau du film ; vous vous rapprochez d'un coin en partant du centre ; tant qu'elle ressemble à une ellipse à bords arrondis et pas à un oeil de chat à coins pointus, c'est bon, vous êtes dans le champ de plein lumière. L'oeil de chat vient de ce qu'une bordure interne de lentille vient couper l'image du diaphragme. On entre alors dans le champ de contour qui est très étroit sur les optiques de chambre. Dans cette zône la luminosité chute très brutalement à zéro. c'est la limite ultime du cercle-image. Il y a donc deux phénomènes qui apparaissent successivement lorsqu'on regarde la pupille d'un point qui se rapproche du bord du champ, d'abord l'aplatissement "naturel" de la pupille (on reste dans le champ de pleine lumière) puis le découpage de cette pupille par un bord de lentille qui donne l'oeil de chat (on entre alors dans le champ de contour).
L'oeil de chat apparaît plus tardivement lorsqu'on est très diaphragmé, d'où le fait que le champ de pleine lumière est plus large à f/22 qu'à f/5,6. Mais ceci est un peu décorrélé de la perte de lumière "naturelle".
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