Auteur: Denis
Date: 07-10-2004 22:01
Si, si, ça intéresse directement l'esthétique photographique, bien sûr. La photo, et particulièrement la photo noir et blanc, donne à saisir cette discontinuité de l'univers - si l'univers était continu, il n'y aurait ni planètes, ni photos, ni tables, ni animaux ou huimains, mais un continuum, une purée indiscernable -, à deux occasions. Lors du basculement des grains d'halogénure d'argent - ils réagissent à la lumière selon des lois quantiques - et, on ne le sait que depuis plus récemment, lors du développement, qui a été défini par des chimistes comme un effet quantique de masse. Mais là, je ne suis pas un spécialiste, je crois qu'il y un changement d'échelle brusque, discontinu, entre les particules affectées par la lumière et celles qui seront sur le négatif ou le positif (mais là, je suis très très imprécis).
Ça été publié en 1986 dans La Recherche, si mes souvenirs sont bons.
C'est essentiel donc, parce que la photo N/B donne à voir cette discontinuité fondamentale, évidemment pas de façon explicite, mais de façon latente.
Il y a des chances, par exemple, pour que cela ait secrètement infuencé Duchamp, dont le cœur de l'œuvre est en quelque sorte "l'effet quantique". Mettre des moustaches à la Joconde, ou introduire un urinoir dans un musée, sont des petits grains, des petits quanta, qui font basculer une grandeur, ou des codes, ou ce qu'on veut. L'œuvre de Duchamp, ce n'est pas un hasard, est contemporaine des débuts de la physique quantique.
Quant au fait que nous baigons en permanence dans un océan de photons, si ça n'intéresse pas la photo, alors je ne vois pas ce qui peut l'intéresser...
Un photographe joue en permanence avec deux constantes cosmologiques, valables dans l'univers entier : c (la vitesse de la lumière) et h, la constante de Planck. Ce n'est pas indifférent pour une pratique artistique.
Je considère qu'Avedon, par exemple, avait un regard très "cosmologique".
Bon, mais je ne fais jamais que redire mal ce qui est très bien expliqué chez mon philosophe chéri.
Denis le quanta
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