Auteur: Jean-Louis Llech
Date: 31-08-2004 15:07
Pour répondre à Jean-Claude Pronier, qui disait dans un autre sujet sur le Rolleiflex SL66 : "il parait que le Mamiya 7 est un appareil fantastique, léger, précis pour la mise au point et dont la gamme d'objectif est tres performante", j'ai décidé d'écrire ici tout ce que je pensais du Mamiya 7-II, le bien et le mal. Quand je dis "je n'aime pas", je ne balance pas des affirmations gratuites, je justifie pourquoi je n'aime pas. Mes goûts et mes couleurs. Ce sera à vous de juger.
D'abord, pour commencer, je n'aime pas trop travailler en format 6x7. Je l'utilise parfois, mais mes formats de prédilection, ce sont le 6x6 et le 6x9.
Le 6x7 a été baptisé "format idéal", mais idéal pour quoi faire ? Ce genre de qualificatif m'a toujours fait sourire, parce que c'est un argument qui a l'air purement commercial. Comme les nouilles sacrées "produit de l'année", ou la moutarde élue "saveur de l'année".
Ou un format est carré, ou il est rectangulaire. Et dans ce second cas, il l'est vraiment. En moyen format, un 6x6 est carré, un 6x9 est rectangulaire. Cela ne me fait pas la même impression avec le 4x5", peut-être du fait que la surface est plus grande, mais je trouve le 6x7 trop proche du carré, c'est du rectangulaire-carré.
J'ai pu essayer un Mamiya 7-II, il y a presque deux ans, assez longtemps (pas dix minutes dans un coin de magasin) pour m'en faire une appréciation sérieuse. C'est un appareil qui ne laisse pas indifférent. Je lui trouve plusieurs imperfections, certes pas fondamentales, mais assez pour que je n'envisage pas d'en faire mon moyen format courant :
a) Les objectifs :
- Les cadres collimatés dans le viseur uniquement pour le 65, le 80 et le 150. Je trouve l'amplitude de ces trois focales "écrasée" : équivalent en 35mm à 32, 39 et 71mm. Sur trois focales, j'aurais préféré une amplitude 28-50-90mm.
- Dommage de devoir utiliser un viseur annexe pour les 43 et 50mm, surtout pour ce dernier qui est un grand angle fréquemment utilisé (équivalent 25mm)
- Le 210mm qui n'est couplé à rien, ni au télémètre, ni au viseur, et doit utiliser un troisième viseur annexe. La mise au point n'est pas télémétrique, mais pifométrique.
Beaucoup de complications pour un petit télé de 105 !
J'avais précédemment écrit que le fait d'utiliser la moitié des optiques avec des viseurs annexes, sans rappel du cadrage dans le viseur, faisait un peu "bricolage". Alors, en plus ne pas avoir le couplage au télémètre, c'est le comble. (Ma Linhof est couplée au télémètre du 72 au 400 !)
- L'amplitude des focales : les quatre premières sont assez mal échelonnées : 21-25-32-39, et les télés 71 et 105, assez faibles. N'avoir au maximum qu'un 210 est un peu décevant. 210mm, c'est correct pour du 4½ x 6, pas pour du 6x7. Et j'ai horreur des doubleurs.
Le Leica M a des cadres collimatés pour les 28, 35, 50, 75, 90 et 135, que je trouve bien échelonnés. J'aurais aimé un 6x7 qui offre les mêmes possibilités. Si on peut le faire sur un petit Leica, pourquoi pas sur un gros 6x7, où il y a beaucoup plus de place ? ;>)
Comme les 43, 50 et 210 ont été rajoutés par la suite (le 210mm est très récent), le boitier n'avait pas été conçu pour ces focales. Un avantage des appareils TTL, où la baïonnette est le seul trait d'union entre le boitier et l'objectif, et par conséquent la gamme peut évoluer sans perdre les fonctionnalités.
- La distance minimale d'utilisation : 1 m pour toutes les optiques sauf le 150 (1,8m) et ce vilain petit canard de 210 : 7m !
- Pour un appareil dont la vocation est la photographie à main levée et par conséquent en "available light", les ouvertures maximales sont relativement faibles : f/4 pour le 80mm, f/8 pour le 210 et f/4.5 pour les autres. Je sais bien qu'on ne travaille pas à pleine ouverture, et que le moyen format ce n'est pas f/1.8, mais quand même...
b) Le boitier :
- Le système de mesure de la lumière dont j'ai l'impression qu'il varie selon la focale employée. En effet, la mesure de la lumière ne passant pas par l'objectif, son angle est fixe (je crois dans les 35°) et donc la mesure varie selon l'angle de l'objectif : Mesure intégrale pour le 150, centrale pour le 43 et le 50. Pas catastrophique, mais à savoir.
- Le système du rideau d'occultation est un peu agaçant à chaque changement d'objectif, et en plus j'ai toujours peur de heurter le rideau d'occultation, ou la roulette du télémètre. Il faut du doigté.
- La finition, un peu "plastique" à mon goût. Je suis un fils des "gros panzers tout en fonte", on ne se refait pas. Un Mamiya RZ, ou une Master Technika, ça donne une impression de solidité. Un Rolleiflex, de solidité et de finesse à la fois.
- Globalement, le prix du boitier et des optiques, totalement surfait, et qui est une véritable honte. Je ne comprends pas pourquoi ce système est si cher, même à l'étranger.
Des points très positifs :
- Les optiques ont un piqué extraordinaire, un des meilleurs que j'aie jamais vu, et la taille du négatif amplifie encore les résultats. J'ai fait de la dia avec le 7-II, c'est somptueux.
- L'utilisation générale est simple, peu de commandes, bien placées, et le boitier tient bien en main. Seule la commande du rideau d'occultation n'est pas "naturelle".
- Un boitier et deux ou trois optiques, c'est très léger, (cela se complique si on veut en utiliser deux boitiers et d'autres optiques)
- Moi qui adore les télémètres, le viseur est très clair, les cadres collimatés bien visibles, les indications dans le viseur lumineuses. On sait qu'un viseur télémétrique n'est pas WYSIWYG, et qu'on ne peut jamais lui faire entièrement confiance, celui du Mamiya 7-II comme les autres, mais il est très agréable à utiliser.
Alors, je rale d'autant plus après les défauts, que les qualités intrinsèques du Mamiya 7-II auraient pu en faire un appareil tout simplement exceptionnel, avec des objectifs mieux échelonnés et tous couplés à l'ensemble télémètre-viseur.
D'autre part, compte tenu de l'investissement très coûteux dans tout système moyen format, et de la disparition de plus en plus régulière d'émulsions argentiques, je serai plutôt rassuré, si un jour je ne trouve plus mes films habituels, de pouvoir enlever les dos argentiques et fixer un dos numérique sur mon boitier.
Avec le Mamiya 7-II, comme avec le Pentax 67, il faut s'enlever ça de l'idée. Plus de films argentiques, et voila de magnifiques presse-papiers, comme dirait notre ami Henri Gaud.
Finalement, je comprends pourquoi j'aime autant le grand format.
On peut choisir les objectifs qu'on veut (la marque et les focales), les formats de film qu'on veut, les dos qu'on veut. et, comme je le disais plus haut, une Linhof peut être couplée avec des objectifs du 72 au 400mm. En plus, le viseur est un vrai bijou.
J'espère que ces quelques éléments pourront permettre à ceux qui veulent acheter un moyen format d'avancer un peu plus avant dans leur réflexion.
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