Auteur: Nicolas Marailhac
Date: 27-04-2004 20:13
Bonjour,
Les pensées du soir…
Je rejoins un peu Henri Peyre:
- se poser la question de savoir ce que l'on est ou ce que l'on n'est pas ne mène pas à grand'chose, en tout cas ne participe en aucun cas du cheminement personnel (je reconnais que cela a une valeur certaine en ce qui concerne la reconnaissance sociale, ce dont on a également besoin, mais qui ne participe pas, je pense, du chemin que l'on fait chacun vers ce que l'on est: ça, c'est une histoire qui ne regarde que nous);
- le fait qu'il existe des tendances, que ce soit en art ou dans le choix des prénoms des enfants, peut être un fait à étudier, polémiquer, critiquer, etc. Pour autant, ça ne sert pas à grand'chose non plus, car poser un regard critique et serein sur quelque chose est suffisamment difficile quand on a un minimum de recul (posez la question à un(e) historien(ne) par exemple), alors qu'est-ce que c'est quand on a le nez dans le guidon!
- tout cela participe de l'air du temps: bon, qu'on le trouve trop frais ou trop chaud, qu'est-ce que ça change? Ce qui compte, c'est le monde que chacun se crée autour de soi, à portée de bras et pas chez le voisin ou avec une visée universaliste;
- ça souligne bien un fait: il est toujours plus difficile de dire Moi que l'Homme, avec le plus grand H possible; malgré les enseignements que nous laissent toutes les histoires, on se retrouve toujours avec les mêmes errements: je me réfugie derrière l'Homme avec un grand H, l'Humanité, le Cosmos, tout ça parce que j'ai peur de moi ou parce que je n'ose pas me chercher;
- pour revenir à la photographie dite de haute résolution (et quel que soit le format), je trouve que c'est, comme tant d'autres, un bon moyen de se trouver, ou du moins de s'interroger: apprendre à poser un regard, c'est dire voilà ce que je veux voir, plus que voilà ce que j'ai vu.
C'est pour ça que la question de la créativité ne se pose pas, même si cela peut être un exercice intéresant (voir ici); on pourrait presque penser que si, finalement, au terme (s'il existe) d'un long cheminement en photographie, on se retrouve à se dire "ben mince alors, ce que j'ai compris c'est que je suis un homme", c'est que le but est atteint, et donc si, au long de ce cheminement, on se trouve à faire des choses qui ressemblent ou qui évoquent étrangement des choses déjà vues ou déjà faites, c'est que l'on avance suivant un rythme qui est partagé par d'autres, non? Et où est le mal?
Si, par contre, on se retrouve seul à faire des choses, si, comme dit l'autre, on voit les autres s'éloigner de soi, c'est que notre monde s'agrandit, que l'on est arrivé à un endroit où la voix n'a pas encore porté, où le regard ne s'est pas encore posé. Et où est le mieux par rapport à l'autre avancement? Certes, on a souvent tendance à plus porter d'intérêt à ce qui marque la rupture que ce qui marque la continuité; mais en y réfléchissant, faut-il vraiment y porter un jugement de valeur? (Tiens, ça me fait penser à certains passages de cette discussion)
La deuxième raison qui fait que la question de la créativité ne se pose pas, du moins en photographie, c'est que cela sous-entend qu'il faudrait mettre au monde une chose qui n'y était pas avant; moi, j'ai du mal à me faire à cette idée, de la même manière que je ne vois pas en quoi je suis plus créateur de ma propre vie que mes parents, ceux qui m'enseignent, ceux que j'apprécie, ceux que je ne veux pas voir, etc. Non, je ne suis pas créateur de ma propre vie, je suis peut-être une sorte de contremaître qui essaie de faire en sorte que l'édifice ne part pas dans tous les sens, et encore!
Voilà, je m'excuse car je me suis laissé emporter et c'est -encore une fois- parti dans tous les sens!
N
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