Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 18-03-2004 10:38
Anciennes notices photos : très bonne remarque, Alain-Marc;
Mais il faut regarder au cas par cas.
Prenons l'exemple des notices des appareils Rollei classiques d'avant 1981. Le copyright, texte et photos de ces notices appartenait à la Rollei Werke Franke & Heidecke. Société qui a disparu en 1981. Une partie des actifs, brevets, etc... de l'ancienne société ont été repris par la Rollei Fototechnic. Quid du copyright ? la Rollei Fototechnic se gardera bien d'afficher publiquement : 'allez-y les gars, photocopiez tant que vous voulez, on vous soutient'. La nouvelle société, qui n'assure plus le SAV des matériels de la Rollei-Werke mais qui détient encore certains brevets, pour autant qu'il ne soient pas tous tombés dans le domaine public, et qui détient marques et modèles (protection illimitée) n'a pas un centime à dépenser pour aider les conservateurs à continuer à utiliser les vieux appareils.
Donc, objectivement la Rollei Fototechnic a tout intérêt à laisser les passionnés faire le SAV doc technique. C'est donc une tolérance qui arrange la nouvelle société en contribuant à la bonne renommée de la marque, une publicité gratuite en quelque sorte. Il serait tout à fait contre-productif, coûteux et juridiquement incertain d'attaquer en justice ceux qui propagent les photocopies des notices d'avant 1981. D'où la situation actuelle qui est une tolérance de fait mais qui n'exonère pas du tout du droit de copyright.
Le problème est donc très différent de l'incitation au piratage d'ouvrages protégés par le copyright. Je me place uniquement sur le plan d'une loi que même l'ex-URSS a fini par accepter en rentrant dans le rang après des années de guerre idéologique. Je ne me place pas sur le plan moral : "Soyez sympa avec les auteurs, etc.. " çà c'est aussi un argument auquel je souscris personnellement, mais un tribunal n'a pas a être sympa ou pas sympa : on juge la contrefaçon sur pièces et sur textes. Or un texte affiché publiquement est une pièce juridique. Un coup de fil privé n'en est pas une.
Autre exemple très subtil sur le copyright, C'est celui des partitions musicales d'oeuvres tombées dans le domaine public. D'une certaine façon, la notice du 3,5F de 1960 est un bien culturel qui appartient à tous au même titre que les 6 Suites pour Violoncelle Seul de Jean-Sébastien Bach. Imaginez que par passion pour cette oeuvre que, tel Pablo Casals, vous jouez tous les matins (le lundi : la suite I, le mardi : la II, ainsi de suite jusqu'au samedi avec la VI), que pour communiquer cette passion vous faites un "scan" d'une partition et vous l'affichez sur Internet.
Crac-dedans : violation de copyright ; la seule chose que vous pouvez afficher c'est une ré-écriture personnelle de la partition en prétendant que vous l'avez, tel J.S.B. lui même, recopiée à la chandelle quelque part entre Mühlhaüsen et Leipzig. Demandez aux choristes le coût des partitions pour toute oeuvre exécutée en public ; demandez aux conservatoires les système de photocopies payantes pour les partitions de travail des élèves, et demandez à tous les établissements d'enseignement les sommes forfaitaires qu'il payent au titre des photocopies d'ouvrages protégés.
Demandez même aux paroisses catholiques romaines qui ont dû après Vatican II re-créer un corpus de cantiques en langue vulgaire pour leurs fidèles (rien que 450 ans de retard par rapport à d'autres obédiences chrétiennes : cela ne compte pas vis à vis de l'Éternité) ; les éditeurs de livres de cantiques ne vont pas attaquer en justice les bons prêtres qui, le jour d'un mariage, photocopient les cantiques pour les incroyants qui ne viennent à l'église que pour y faire des photos avant l'apéro ; ce serait contre-productif, mais lorsqu'il s'agit d'équiper l'église d'un lot de cantiques neufs, je doute que la photocopie soit admise. Même si les intentions sont pures & louables. Comme pour les partitions musicales et pour les mêmes raisons.
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