Je ne regarde même pas le pdf.
OK, t'as raison...
Voici un très bel exemplaire
N° (** note 1) 4 de cette série hors série (** note 2), de la revue « Regards » consacré aux images de Claude Belime en résidence dans le Parc Naturel Régional des Pyrénées Catalanes. Organisé par l'association BlaBlart.
Je me félicite sincèrement de ne pas avoir pré-visualisé l'ouvrage. Du coup, j'ai eu le plaisir délicieux de la découverte de ce travail de Claude Belime, dans le monde réel, entre mes mains, confortablement installé.
La série sur les pentes est un modèle du genre, et, à mes yeux, un guide pour l'action à destination de l'amateur de photos de paysage montagneux & boisés ; faire naître le merveilleux à partir du point de vue sur un paysage, merveilleux joint à une certaine forme d'abstraction graphique, à partir d'un cadrage bien choisi, avec la bonne lumière, sans artifice. On aurait envie de dire «
simplement, avec ... » alors que dans un monde photographique dominé par l'artifice de la retouche en post-production, cette règle, a priori désuète des maîtres anciens
(quoique, les nuages rajoutés artificiellement existent depuis 150 ans ...), semblerait, tout au contraire, d'une grande complexité et d'une grand difficulté pour le photographe « moderne ».
En Franche-Comté, que je crois pourtant bien connaître, les pentes boisées sont notre environnement premier, ces lieux m'ont toujours paru hostiles
(je préfère, et de loin, nos combes & nos crêtes) et photographiquement, le sujet m'a toujours paru inaccessible. Le travail de Claude Belime devrait donc, en principe, pousser les Comtois timides à « attaquer » leurs pentes boisées avec moins d'appréhension.
Le autres parties de l'ouvrage n'appellent de ma part que des éloges, j'ai montré le livre rapidement à mes enfants qui ont été surpris et passionnés, par exemple, la crinière du cheval comme élément étrange dans le paysage.
Tout au plus aurai-je quelques réserves, à la fin, sur les pylônes & câbles de téléskis dans le brouillard. Pour moi, une verrue dans le paysage reste une verrue, qu'elle soit en pleine lumière d'été, sur une pauvre pente ravagée par les machines à raboter les aspérités, ou que ce soit l'hiver, lorsque les roues & les fils sont à demi-cachés dans la brume, et que la neige occulte également les horreurs au sol que l'on peut voir l'été.
Cette réserve étant dite sans détour, cette partie appelle, de fait, de ma part, plus de commentaires non-photographiques que les précédentes, où je ne peux que m'incliner devant la perfection du travail.
La première remarque sera météorologique et climatique.
Vu de notre Franche-Comté humide et froide, il n'y a que ceux qui ne sont jamais allés dans les Pyrénées qui pensent que le brouillard est une exclusivité du Grand Est. Tout au plus, ceux comme moi qui ont un jour couru à toute vitesse à la descente du Pic d'Anie
(de retour précipité vers la Pierre Saint Martin), pour ne pas se faire prendre par la brusque montée des nuages au moment de la traversée du grand lapiaz des Arres d'Anie, savent que les Pyrénées sont des pièges à brouillard
formidables au sens étymologique. Et dans ces conditions, je peux vous dire que les câbles d'une remontée mécanique n'apparaissent plus du tout comme une verrue dans le paysage ; c'est, tout au contraire, un signe salvateur, comme la mouette indiquant l'approche des terres au navigateur perdu. Expérience vécue ce jour là, en approchant de la station de ski de la Pierre Saint Martin.
Pour ceux qui ne connaissent que les Pyrénées occidentales, où la présence du brouillard n'est pas difficile à imaginer vu la circulation métérologique d'ouest, il faut dire également que dans les Pyrénées centrales, l'une de plus belles mers de nuages que j'aie jamais vue est probablement celle qui nous a enveloppés froidement, mes camarades de randonnée et moi, en redescendant de l'itinéraire H.R.P, au-dessus du tunnel de Bielsa, alors qu'absolument aucun nuage n'était visible de la magnifique crête ensoleillée, en regardant vers le versant espagnol.
Bref, ne connaissant pas les Pyrénées orientales, ou si peu (Fontfroide et Carcassonne étant les exceptions qui confirment la règle), certains Comtois s'imaginaient cette partie méditerranéenne des Pyrénées comme une oasis de sécheresse et d'anti-brouillard, un lieu de fantasme, un eldorado de confort, pour les Doubiens retraités perclus de rhumatismes.
À la vue de la série de Claude Belime, la chute est rude : ce n'était donc qu'un rêve, un mythe, cette absence d'humidité et de brouillard dans les Pyrénées orientales !! ;-);-)
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La deuxième remarque concerne les installations et les emplois dans nos parcs naturels régionaux.
Au contraire de nos Parcs Nationaux, qui s'approchent un peu des principes fondateurs de
John Muir aux États-Unis (garder en l'état un conservatoire de nature vierge pour que les générations futures puissent en bénéficier), nos parcs régionaux sont là où la main de l'homme a mis le pied dès que les glaces du Würm se sont retirées. Donc nos parcs régionaux doivent aussi être au service des hommes (et des femmes, parité oblige) et de celles & ceux qui veulent vivre et travailler au pays. Par exemple autour des activités de tourisme de montagne, le ski sur pistes (descente ou fond) étant l'une de ces activités créatrices d'emplois directs et indirects. À ce stade de la discussion, nous avons, nous aussi, nos tire-fesses dans l'arc jurassien franco-suisse en général et dans le parc régional du Haut-Jura en particulier, nous baissons les yeux, et arrêtons le persiflage vis à vis des verrues dans le paysage en pensant à ceux qui vivent et travaillent, certes, grâce à la préservation de nos espaces habités et naturels, mais aussi grâce à toutes sortes d'installations & d'aménagements.
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Encore bravo l'auteur, Claude Belime, encore bravo à tous ceux de l'association BlaBlart. Chapeau bas !!
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(** note 1) La Comtesse a montré la couverture des revues Regards à DSK, en pointant les particularités étranges de la charte typographique. DSK a répondu : « C'est ballot : comme pour ma crèche, cette maquette donne envie de diéser.»
(** note 2) Pour paraphraser Léo Ferré et son drapeau noir, qui est encore un drapeau : une série de hors série, qui en est déjà au
N° 4, c'est déjà une belle série.
E.B.
Modifié 1 fois. Dernière modification le 25/06/2012, 10:36 par Emmanuel Bigler.