3 ème fil sur des questions qui n'en finissent pas.....

Au fond, il ne s'agit pas de juger un homme (ou une femme) - photographe, ou le désir d'un sujet, mais de se demander si et comment c'est possible, et à quel prix, pour lui et pour les autres. Et ce que cela "dira" et montrera de plus que tout ce qui est déjà montré - et dit dans la littérature et sur le net et dans les livres d'image.

Ce prix là, c'est bien d'un coté celui de l'image des personnes qui seront prises, il faut pas trop se leurrer, de l'autre les risques physiques que prendra l'auteur pour être là où son sujet est, en prendre et en ramener des photographies.

Je tiens Requiem pour un des plus beau livre qui soit, on sait le prix qu'en ont payé tous les photographes. Lorsqu'un photographe va à la guerre, il va à la guerre ; sans doute, c'est presque simple pour lui, moins pour sa famille et ses amis.

Si il veut faire des photographies de dealers au pied des barres d'immeubles, c'est encore autre chose ; en aucune mesure il ne pourra montrer leur visage - sinon celui mort d'un chef de cartel mexicain, donc de toute façon on risque d'arriver à une reconstitution pseudo réaliste d'un métier, et on sait qu'à ce jeu là ce sont les médias amateurs d'images chocs et choquantes qui gagnent, pas les photographes sérieux. Il faut comme disait l'autre, des sherpas, en amont, en aval, des avocats, etc etc...

Il se trouve que j'ai traversé une bonne partie de la région l'année passée à pied pour la photographier, de Chantilly à Dourdan. Ca parait bête, mais la question s'est posé. Est-ce que cela doit faire partie du truc, est-ce que c'est une obligation de rendre compte de cela, même indirectement? Ces lieux là, dont on nous rabâche l'importance, doivent ils être montrés, même très discrètement? Selon certains, toutes les cages d'escaliers du Val d'Oise devaient être sécurisées (ça m'est tombé dessus quand je passais à Villiers le Bel). Fallait il évoquer, même discrètement, le sujet?

Bref, j'ai répondu non, c'est à dire que je n'ai pas voulu que la représentativité atteinte au final touche à cet aspect là de la banlieue. A l'inverse, il y a, sur les clichés, discrètement mais surement, c'est à dire pas en gros plan, mais perdus dans des cadres plus vastes, des traces de la présence des camps Roms dans le 93. Si j'ai fait ce choix, c'est parce que d'un coté il est impossible de traverser le nord de l'Ile de France sans tomber sur ces néo-bidonvilles, et que de l'autre on peut faire 400 km à pied en banlieue sans tomber sur la moindre zone de deal.

Il y a toujours, aussi, il ne faut pas se leurrer, un pouvoir de la position derrière les prétextes que l'on se donne à prendre une situation et pas une autre. Si je prends un tsigane, même de loin dans une vue d'ensemble, j'aurais l'avantage de la langue, du pouvoir de l'appartenance géographique, etc. Si je prends un dealer, même de loin, et que ça lui plait pas, les données de positions respectives ne seront pas les mêmes du tout.

Aussi stupide que cela paraisse, il faut répéter que c'est bien la prise de l'image des gens et la position du photographe qui pose problème. Si untel veut faire un livre de textes sans photographie sur les bordels contemporains, une telle question n'a pas de - ou pas du tout le même - sens. Anonymise, fictionnalise, et fait ce que tu as envie de faire. C'est peu ou prou ce que fait via le flou D'Agata, ce qui fait que cela ne m'a jamais passionné.

Des réponses aux questions douloureuses ci-dessus pour moi plus franches et intéressantes sont celle d'Araki - ouvertement consommateur (ou en tout cas grand fréquentateur), et celle de Nan Goldin - prendre ses amis divers et variés.

On ne peut pas (ou plus) dire, c'est un de tes points de départ, Marc, c'est triste donc je veux le montrer. Ca ne suffit pas, c'est pas (ou plus) une position particulière, en tout cas, il n'y a pas grand chose à ce stade là qui la distinguera d'un reportage glauque à double facette de TF1 sur le même sujet. Je veux dire, et là c'est personnel, c'est encore du voyeurisme quelque part, sans que nous puissions, facilement, te proposer de solution qui te permette de sortir de cela :

Lorsque tu écris :

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Je suis dernièrement allé visiter le Paradise - vous vous en doutiez - vendu comme le plus grand bordel d' Europe et pour qui reste au bar, c'est un défilé permanent de filles qui viennent à vous tour à tour pour essayer de vous convaincre de monter. Et bien d'étonnantes conversations s'ensuivent après le petit jeu rituel, le temps est rétréci, très vite c'est un peu comme vous étiez leur ami de longue date, faut dire qu'un quinqua gentil est plus apprécié qu'un djeun à casquette sur le côté qui les traitent souvent comme des chiennes, et j'ai plus appris là, sur la géopolitique du monde, leurs conditions de vie dans leur pays respectifs, leur idée du monde et des hommes que je n'aurais pu le faire par de nombreux cours du soir... Il y a véritablement matière à textes pour un livre. Reste l'autorisation pour les photos...

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est-ce que tu touches pas là au noeud de l'ambiguité de ton projet? Je juge pas, j'ai connu les mêmes impressions "au coin de divers situations", je veux dire, on en apprend plus sur la "géopolitique" dans les rues glauques et sales, au coin des rues, aux comptoirs des bars, que place Vendôme ou dans les soirées et les vernissages artistiques. Mais à un moment, on se rend compte que c'est aussi un miroir aux alouettes qui nous est tendu, que c'est du pseudo réalisme post-moderne et que l'on est dupe. Tu penses sincèrement que les filles, quand elles te racontent leurs vies, elles le font sur le dos du patron, en cachette, que le patron ne le sait pas? Que soudainement elles sont dans une phase "sociale"?

Tout cela peut se dépasser, oui mais comment et, surtout, pourquoi?

Trop long j'arrives pas à suivre

et en simplifiant, ça veut dire quoi ?


positions je vois (kamasutra)

ça peut poser problèmes arthrose ankylose luxation ?