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* la remarque de mai *
Envoyé par: la liseuse
Date: 08/05/2010, 07:39

Avec un peu de retard, quelques mots extraits d'un excellent article paru dans Le Monde Diplomatique d'avril :

(…) L'art ne se réduit pas à un discours, un message, il dit ce que l'on ne sait pas encore, il rend visible ce qui n'était pas encore répertorié, il ajoute au monde.
Or cette quête révolutionnaire se trouve désormais, dans l'art contemporain officiel, réduite à de la simple innovation, cette caractéristique de la production capitaliste, très logiquement exigée par le besoin de créer de nouveaux désirs. Il s'ensuit une confusion majeure entre la simple innovation et la quête du sens. C'est là ce dont est victime l'art contemporain. Ce qui pourrait s'exprimer par une loi : plus le marché de l'art sera puissant, plus les conditions générales du marché tendront à s'imposer à la production artistique.
(…)

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 08/05/2010, 14:19

La pensée de Dany-Robert Dufour est instantanément reconnaissable, même si je n'ai pas lu l'article je suis prêt à m'avancer là dessus (pour moi un grand philosophe d'aujourd'hui).
Entre la "simple innovation" et la "quête de sens", c'est précisément la confusion entre l'objet issu d'une technologie destinée à être vendu et le sujet , l'art. C'est un de ses grands sujets de réflexion : pourquoi la marchandisation du monde avance t-elle sans frein dans notre société post moderne, en quoi la confusion sujet-objet en est un élément fondateur, et pour quelles conséquences.
L'une d'entre elles est le remplacement pur et simple de la culture par une succession de modes.

En ce qui concerne la photographie, je crois que si elle est effectivement affectée par ce processus, petit à petit elle est repoussée aux marges par le ralentissement dans la création de nouveaux désirs. Les artistes les plus ambitieux, du moins sur ce plan-là, ont bien compris l'impasse qui se profile pour ce "vieux" médium, et mutent vers d'autres territoires plus "en vue" comme ceux de l'installation. Pour un grand nombre de ces "acteurs" il s'agit d'une attitude purement opportuniste : la photographie, dans la perspective d'une recherche artistique, celle de "l'ajout au monde" est devenue extrêmement difficile et complexe. Paradoxalement on peut espérer qu'elle sera bientôt incapable d'accompagner le mouvement effréné de la mode, un peu comme la peinture aujourd'hui, quitte à occuper une position marginale sur le Marché.



Modifié 5 fois. Dernière modification le 08/05/2010, 14:28 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 09/05/2010, 07:43

Très souvent l'innovation a permis l'apparition de nouveaux domaines artistiques et, avec l'exploration de territoires désormais à portée, l'apparition de nouveaux sujets et de nouveaux et authentiques rapports au monde. Il est donc difficile d'opposer nettement le sujet et les moyens, même si on peut espérer, avec Zoran, une sorte de pureté pour les oeuvres d'un medium que l'innovation technologique a finit par abandonner (comme la peinture). Cette sorte de pureté ne vient toutefois très exactement que de ce qu'un des termes de la confusion est mort. C'est donc simplement un soupçon qui disparaît ;-)

2 exemples parmi tant d'autres de la confusion technique et du point de vue artistique :
- le conditionnement de la peinture en tube facilite définitivement la peinture en plein-air à la fin du XIXème. Nouveau rapport à l'espace, à l'air, à la lumière, nouvelles palettes, disparition des terres, nouvelles exigences tonales pour les artistes, impressionnisme.
- issu du numéro 25 d'Etudes Photographiques, reçu hier dans ma boîte : dans l'article "Avant la forme tableau" : Olivier Lugon souligne l'influence du procédé japonais NECO, commercialisé par 3M sur la constitution de la "forme tableau" pour S.Shore. Le procédé permet le tirage en très grand format et haute résolution avec une relativement bonne fidélité des couleurs.

Dans la citation de Guillaume : "L'art ne se réduit pas à un discours, un message, il dit ce que l'on ne sait pas encore, il rend visible ce qui n'était pas encore répertorié, il ajoute au monde".
Pour moi c'est peut-être un peu trop une définition qui croit que nommer suffit. On a trop connu au moment du structuralisme l'emphase du verbe, les créations de mots qui se pensaient création de concepts. Je n'adhère pas. Pour moi l'art a à voir avec la capacité à la souplesse des points de vue. C'est-à-dire justement avec la défiance sur l'idée que les choses pourraient être attrapées avec un répertoire de mots. Les mots ne sont pas la fin du processus artistique. Ils ne sont que des moyens qui permettent de créer des sorte de vues spécialisées qu'on pourra mieux opposer les unes aux autres. Et la jouissance artistique sera dans cette opposition.
A ce titre une nouvelle technique permet probablement d'ajouter plus facilement un nouveau regard sur le monde, regard qui, dans un premier temps tranche agréablement avec le déjà vu, causant un choc de même nature que ce qui est artistique. Mais l'artistique n'a pas forcément besoin de l'innovation pour fonctionner.

L'auteur parle, pour l'art, de "quête du sens", qui serait confondu avec la "simple innovation". On aurait besoin de plus de contexte pour avancer et éventuellement critiquer un peu.
Sur la "quête de sens" : il me semble que l'art est plus une quête de jouissance liée à un impératif de se connaître mieux soi-même, afin de mieux cerner par quelles voies on peut avoir un peu de jouissance. Si on cherche du sens sur le monde en général, il vaut probablement mieux se rapprocher de la science, dont les outils ont l'air plus objectifs. Dans cette perspective encore, opposer "quête du sens" et "innovation" paraît peut-être un peu vain.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: didier d
Date: 09/05/2010, 08:28

henri peyre écrivait:
-------------------------------------------------------
> L'auteur parle, pour l'art, de "quête du sens",
> qui serait confondu avec la "simple innovation".


N'est-ce pas ce que l'on a déjà appelé le modernisme?

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Tout et n'importe quoi, au jour le jour

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 09/05/2010, 08:38

didier d écrivait:
-------------------------------------------------------
> L'auteur parle, pour l'art, de "quête du sens",
> > qui serait confondu avec la "simple
> innovation".
>
>
> N'est-ce pas ce que l'on a déjà appelé le
> modernisme?


A demander à l'auteur lui-même ;-)

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: didier d
Date: 09/05/2010, 08:47

après lectures de différents articles et interventions ici, particulièrement les vôtres, je suis en train de finir la lecture de l'histoire de l'art de Gombrich. J'essaie simplement de voir si j'en ai compris les concepts cités... :)

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Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: GERARD
Date: 09/05/2010, 10:12

"il dit ce que l'on ne sait pas encore, il rend visible ce qui n'était pas encore répertorié" : au premier degré évoque l'aptitude dite du médium . Mais in fine n'est ce pas relatif à la méta idée temps comme propriété nous permettant d'ordonner les objets-évènements afin de nous y retrouver facilement ?

"L'une d'entre elles est le remplacement pur et simple de la culture par une succession de modes" : peut on dire que la culture reste et se transmet , la mode passe et repasse ?

"l'emphase du verbe, les créations de mots qui se pensaient création de concepts" : mode est aussi création épisodique de collections de mots , création dont avec un peu de recul on découvre qu'elle recouvre une idée aussi ancienne que l'homme . N' y jouons nous pas souvent ici ?

"l'idée que les choses pourraient être attrapées avec un répertoire de mots" : le geste du mime n'est il pas un mot qui attrape l'idée de la chose comme une mouche dans la main leste ?

JG

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: GERARD
Date: 09/05/2010, 10:15

En Avril tu te défiles mais comme en Mai pense ce qu'il te plait . JG

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 09/05/2010, 13:47

"l'auteur parle, pour l'art, de "quête du sens", qui serait confondu avec la "simple innovation". On aurait besoin de plus de contexte pour avancer et éventuellement critiquer un peu. "

Bonjour,

Il apparaît clairement dans cette citation qu'il s'agit de l'art contemporain officiel dans le contexte du marché d'aujourd'hui. Il avait été donné ici en exemple (perdu dans l'ancien forum) le travail de Loris Gréaud qui me semble exemplaire de ce que veut dire Dany-Robert Dufour.
Lors de son exposition "Cellar door" du Palais de Tokyo répertoriée par la critique dans le néo genre du "blockbuster", L Gréaud avait entre autres fait un relevé de plan de l'institution découpé dans du papier métallique, simplement chiffonné en boule dans ses mains, ensuite grâce à une technique complexe de repérage de la boule ainsi formée, des ingénieurs ont modélisé la forme et proposé un plan pour la reconstruire en format géant : chaque segment de papier plié apparaît sous la forme d'un néon. L'ensemble est une sculpture-installation lumineuse vide de sens ou le spectateur est invité à se projeter (il était question de "proposition mentale"). Le même artiste a encore proposé des nano sculptures en collaboration avec un laboratoire du CNRS, toutes vendues avant même l'ouverture de l'exposition (en réalité les formes apparaissaient sur des écrans vidéo).
Voilà de quoi est faite la " confusion majeure entre la simple innovation et la quête du sens".
Si le travail de Stephen Shore s'inscrit encore dans une tradition moderniste, comme les peintres du XIX ième, aujourd'hui les choses semblent avoir pris une autre tournure.

Ps : pour lever toute ambiguïté, et rendre justice à l’auteur, le travail de Dany-Robert Dufour n'est pas dans cette quête de "l'emphase du verbe" fait de néologismes abscons.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 09/05/2010, 13:58 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 09/05/2010, 15:25

J'ajoute que la question n'est pas tant l'apparition de nouvelles techniques mais de la façon dont elles sont utilisées dans le champ de l'art. Il semble d'ailleurs que ce dernier tend à se réduire, remplacé par une activité entrepreneuriale dans un contexte de pur marché. L. Gréaud peut donc tranquillement affirmer en toute logique qu'il récuse désormais l'étiquette "d'artiste", devenue trop embarrassante ou "réductrice" selon ses termes. Je pense aussi que l'emprise du design dans l'art, pointé par JF Chevrier, n'est également pas étrangère à cette évolution.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 09/05/2010, 15:39 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 09/05/2010, 16:29

Merci à Zoran pour ces précisions.

Pour parler de l'exemple pris : est-on réellement là "dans une confusion majeure entre la simple innovation et la quête du sens" ? Je ne sais pas. Quand les propositions sont simplement débiles il y a peu de danger que le public s'y laisse prendre. Maintenant il y a des publics. Chacun vient chercher au niveau de ce qu'il peut recevoir. L'art contemporain peut parfois ressembler à de l'animation pour enfants des écoles. Pas mal d'adultes préfèrent en art aussi la condition ordinaire du mystère à la rare clarté qui devrait, à mon avis, être une de ses qualités.

Je ne sais donc pas bien quoi faire des propos du mois sur l'art. Il y a les artistes auxquels ces propos se réfèrent mais aussi le public pour lequel ils sont émis. Si c'est le Monde Diplomatique, c'est je suppose des gens de gauche, plutôt intellectuels et plutôt avec une bonne formation universitaire. Ce sont aussi des gens probablement plutôt proches des employés de l'Etat, sensibles aux dépenses des collectivités et normalement persuadés que c'est dans la subvention officielle que se reconnaît le talent artistique plutôt que dans le goût des collectionneurs privés. Or ces gens se rendent probablement compte que l'ingéniérie culturelle est devenue une machine qui s'auto-entretient et crache automatiquement du produit pour remplir le calendrier et servir les féodalités installées. Ils s'en émeuvent à juste titre, probablement tout comme notre auteur.
Mais la conclusion citée en tête de ce fil semble ambiguë : "Ce qui pourrait s'exprimer par une loi : plus le marché de l'art sera puissant, plus les conditions générales du marché tendront à s'imposer à la production artistique." Le contexte reste lacunaire : l'auteur déplore-t-il que l'Etat ne fasse plus assez le contrepoids ? (pour ma part au contraire je considèrerait toujours qu'une oeuvre née sous subvention est "mal née").
Zoran si tu as des billes ?

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Xavier R
Date: 09/05/2010, 17:36

Alors que dire des oeuvres du Moyen-ages de la Renaissance et de l'époque de Louis XIV?

Si je photographie quelque chose, tant pis pour elle!

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: gp
Date: 09/05/2010, 18:33

henri peyre écrivait:
-------------------------------------------------------
> Je ne sais donc pas bien quoi faire des propos du
> mois sur l'art. Il y a les artistes auxquels ces
> propos se réfèrent mais aussi le public pour
> lequel ils sont émis. Si c'est le Monde
> Diplomatique, c'est je suppose des gens de gauche,
> plutôt intellectuels et plutôt avec une bonne
> formation universitaire. Ce sont aussi des gens
> probablement plutôt proches des employés de
> l'Etat, sensibles aux dépenses des collectivités
> et normalement persuadés que c'est dans la
> subvention officielle que se reconnaît le talent
> artistique plutôt que dans le goût des
> collectionneurs privés. Or ces gens se rendent
> probablement compte que l'ingéniérie culturelle
> est devenue une machine qui s'auto-entretient et
> crache automatiquement du produit pour remplir le
> calendrier et servir les féodalités installées.
> Ils s'en émeuvent à juste titre, probablement tout
> comme notre auteur.


Extrapolation selon un schéma pré-établi ! ; )
L'auteur n'oppose pas une filière "publique" de subvention qu'il supposerait être vertueuse et une filière "privée" de marché. Il n'en est pas question et j'ose penser qu'il sait bien que les deux sont contaminées de la même façon en soutenant des "œuvres" issues du même tonneau.
Une œuvre née pour un marché où la règle est la recherche de visibilité par le coup d'éclat, la provocation qui entraînera la spirale médiatique puis spéculative, n'est pas "mieux née" ! La critique porte sur le fait que tout, ou à peu près tout, peut se constituer en objet vendable. L'auteur ne parle dans son article que d'objets d'art, mais il est tout à fait possible d'extrapoler cela aux pseudo-innovations dont nous sommes submergés, ou encore aux discours du marketing politique.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 09/05/2010, 18:54

Bon alors j'irai lire le Monde Diplomatique d'avril à la bibliothèque pour voir ce qu'est vraiment ce "art contemporain officiel" qui ne dépend pas de l'Etat et ce "marché" qui ne dépend pas des acteurs privés.
;-)

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 09/05/2010, 18:55

Xavier R écrivait:
-------------------------------------------------------
> Alors que dire des oeuvres du Moyen-ages de la
> Renaissance et de l'époque de Louis XIV?

La même chose évidemment !

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Xavier R
Date: 09/05/2010, 20:11

Alors l'art est pollué depuis toujours exception faite des impressionistes, des fauves, des Dada, des cubistes et expressionnistes abstaits, puis tout recommence à partir du pop art.
Je prends la peinture comme point de repère historique.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Henri Gaud
Date: 09/05/2010, 22:22

la liseuse écrivait:
-------------------------------------------------------
> Avec un peu de retard, quelques mots extraits d'un
> excellent article paru dans Le Monde Diplomatique
> d'avril :

J'imagine que la lecture de l'article ne conditionne pas les interventions
>
> (…) L'art ne se réduit pas à un discours, un
> message, il dit ce que l'on ne sait pas encore, il
> rend visible ce qui n'était pas encore répertorié,
> il ajoute au monde.

Je ne vois en quoi on pourrait contredire cette banalité admise depuis des siècles.

> Or cette quête révolutionnaire se trouve
> désormais, dans l'art contemporain officiel,
> réduite à de la simple innovation, cette
> caractéristique de la production capitaliste, très
> logiquement exigée par le besoin de créer de
> nouveaux désirs. Il s'ensuit une confusion majeure
> entre la simple innovation et la quête du sens.
> C'est là ce dont est victime l'art contemporain.
> Ce qui pourrait s'exprimer par une loi : plus le
> marché de l'art sera puissant, plus les conditions
> générales du marché tendront à s'imposer à la
> production artistique.
> (…)

Je sens juste une frustration dans ces phrases,
Juste le discours du type qui reste au bord de la piscine trouvant que l'eau est trop chaude ou trop froide.
On a l'impression que le type frustré, en plus d'être frustré, ne connait pas bien l'histoire,
Mais ce n'est pas bien grave,
Ses propos n'auront jamais la portée d'un courant artiste,
Ce sont juste les propos d'un spectateur passif.

Quand au dialoque entre innovation et quête de sens, on reste dans le discours de spectateur.
Reste la question : peut-on innover sans apporter du sens ?
Mais cette question reste de la tautologie.

A+

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No Pasaran
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Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 10/05/2010, 00:22

"Zoran si tu as des billes ?"

Pas sur la question de la production, je travaille seul dans mon coin, et je suis heureux comme ça.;)
Je n'ai pas lu l'article de D-R Dufour, il n'est pas encore en ligne et le Diplo n'en montre que l'introduction certes très prometteuse. De cet auteur j'ai lu "L'art de réduire les têtes" sous titré "Sur la nouvelle servitude de l'homme libéré à l'ère du capitalisme total", et à partir de cette lecture je pense que l'auteur pointe un marché qui dicte ses choix et non un état qui devrait mettre de l'ordre (les politiques ont récemment fait le "choix" de sauver le système financier).
Même si on peut juger débile les installations de Loris Gréaud, le succès critique et public montre que le contexte est plus vaste, et qu'il est difficile d'expédier légèrement un phénomène qui n'est ni ponctuel, ni une caricature. En tant que photographe, le travail de cet auteur m'a été très utile pour comprendre certains comportements de directeurs artistiques de festivals, d'institution publiques ou privées, et de galeristes.
Là, oui, j'ai des billes ;)



Modifié 1 fois. Dernière modification le 10/05/2010, 00:26 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: romain
Date: 10/05/2010, 05:42

Bonjour à tous

Je ne connais pas le contexte de la citation mais cela me fait penser aux questions similaires entre sciences et technosciences. Le capitalisme investit dans la technoscience et en vient qu'à ne la légitimer uniquement, au détriment de la science. Cela relaie au second plan l'intérêt de la science, c'est à dire, faire croire qu'elle est inutile parce l'intérêt d'une connaissance détachée de tout but pratique serait futile, voire ce serait gaspiller notre argent parce qu'il n'y a pas de retour sur investissement! C'est l'application pratique qu'intéresse le monde mercantile. on est dans une logique basique de ne pas créer une connaissance pour améliorer notre connaissance et notre rapport au monde, mais d'améliorer des techniques en utilisant la science dans le seul but d'être performatif sur le plan pratique.

Ainsi l'art se ferait dans un but (j'y vais à la grosse cuillère) de vendre, plutôt que celui de questionner son propre rapport au monde. Et pour vendre il faut être dans l'air du temps ou avoir de gros appuis institutionnels (qu'ils soient étatique ou privé). On peut parler comme Bourdieu et placer le problème sur la question de l'autonomie du champ: la science perd son autonomie ce qui signifie que son champ est alors délimité davantage par celui du pouvoir que ce soit l'état ou le pouvoir de l'argent plutôt que par ses agents internes. les agents perdent une certaine liberté de penser puisque c'est la financiarisation du monde universitaire qu'y fait que vous pourrez conserver votre skhôlé que si votre projet est jugé comme soutenable financièrement par des institutions dont le critère de choix est de plus en plus en lien avec l'économie.
Il est de même que le champ de l'art perd une certaine autonomie vis à vis du monde de l'argent qui appliquerait un jugement de valeur qu'à travers la notion d'innovation. Mais pour ma part je ne comprends pas bien ce que signifie "innovation en art" pour l'auteur de la citation?
est-ce un rapport avec la nouveauté dans les techniques de l'art? est-ce un rapport avec l'usage des nouvelles technologies dans l'art, ou même des technosciences dans l'art?

Mais pour autant ce n'est pas parce qu'il y a un usage de nouvelle technique dans l'art qu'il s'agit pour autant de production sans quête de sens. Par exemple Orlan, Eduardo Kac, ou Sterlac participent en tant qu'artiste à la réflexion sur l'humain et la nature humaine. Il y a chez eux une réflexion sur le sens qui a également lieu ailleurs chez Dominique Lecourt, Onfray ou Jean Claude Ameisen.

Un dernier point tout de même l'autonomie de l'art est quelque chose de très récent qui arrive avec le modernisme. Puis au XX ème siècle, la démocratisation de la culture et la culture démocratisée a été possible grâce l'Etat. Mais derrière chaque institution qui a le pouvoir d'acheter, commanditer de l'art et donc de façonner le marché, il y a un individu qui a la liberté d'assumer ses propres idées ou suivre le courant et la mode pour ne pas paraitre idiot ou de peur de manquer son oeuvre. Le conservateur achète pour laisser aussi sa marque, sa trace dans l'institution. bon je commence probablement à m'égarer....

Bref Guillaume, pourrais-tu m'envoyer une copie du texte entier?

romain



Modifié 1 fois. Dernière modification le 10/05/2010, 05:46 par romain.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: gp
Date: 10/05/2010, 07:53

henri peyre écrivait:
-------------------------------------------------------
> Bon alors j'irai lire (…) pour voir ce qu'est
> vraiment ce "art contemporain officiel" qui ne
> dépend pas de l'Etat et ce "marché" qui ne dépend
> pas des acteurs privés.
> ;-)


Es-ce ce réellement que j'ai écrit ?

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Henri Gaud
Date: 10/05/2010, 08:06

Zoran écrivait:
-------------------------------------------------------
> et à partir de
> cette lecture je pense que l'auteur pointe un
> marché qui dicte ses choix et non un état qui
> devrait mettre de l'ordre (les politiques ont
> récemment fait le "choix" de sauver le système
> financier).

Il serait prétentieux de comparer production artistique et système financier.
Et faut-il absolument que l'Etat intervienne pour sauver le monde artistique ?

> En tant que
> photographe, le travail de cet auteur m'a été très
> utile pour comprendre certains comportements de
> directeurs artistiques de festivals, d'institution
> publiques ou privées, et de galeristes.

Il s'agit de systèmes marchands, mais ces phénomènes n'ont rien de nouveau,
Ce qui est nouveau dans le monde artistique c'est le nombre d'artiste,
Pas le schéma économique.

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No Pasaran
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Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: gp
Date: 10/05/2010, 08:10

Henri Gaud écrivait:
-------------------------------------------------------
> On a l'impression que le type frustré, en plus
> d'être frustré, ne connait pas bien l'histoire,
> Mais ce n'est pas bien grave,


Tiens, c'est amusant ! l'auteur parle aussi de cette manière d'emporter la connivence en disant ce que personne n'oserait dire, sans aller plus au fond, pour attirer l'attention et tenter de mettre l'autre en situation d'adhérer pour ne pas paraître idiot.
C'est un ressort de cette "innovation" dont il est question, et qui se base sur l'usage de la provocation

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: gp
Date: 10/05/2010, 08:17

romain écrivait:
-------------------------------------------------------
>Mais pour ma part
> je ne comprends pas bien ce que signifie
> "innovation en art" pour l'auteur de la citation?


Ceci n'est pas développé, mais il s'agit de cette foule d'objets intégrés dans le champ de l'art sous prétexte qu'il n'y aurait pas de hiérarchie possible, tout pouvant devenir "art" simplement parce que c'est désigné comme tel : on en reste finalement à une nième répétition du geste de Duchamp sans pour autant en avoir la portée subversive.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Henri Gaud
Date: 10/05/2010, 08:29

Salut gp,

Ce qui me semble immuable c'est qu'un artiste pour produire doit s'approcher du pouvoir,
Ce phénomène n'est pas nouveau.
Que le pouvoir change de main n'est pas nouveau non plus, le marketing peut avoir plus de pouvoir que l'Etat providence que nous avons bien connu.
Ce que je vois comme nouveau c'est la multitude, et dans cette multitude, une multitude d'artistes, mais les mécanisme de reconnaissance ressemblent à ce que l'on a connu, chez les Médicis ou dans la Rome Antique, l'expression est différente, mais la façon de placer l'artiste n'a pas beaucoup changé.

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No Pasaran
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Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 10/05/2010, 11:29

Avant le XVIII ième il n'y avait pas de critique, l'art était jugé par les pairs et les commanditaires. A la Renaissance il y avait de grandes rivalités entre les artistes pour obtenir les commandes des églises, des princes et des communes, le Tintoret et Titien étaient immensément riches, l'art était donc déjà lié à l'argent. Aujourd'hui la critique est reléguée au rang de médiation ou de communication, et le jugement de valeur se fait désormais aux enchères. Et de ce côté on a pu voir tout et n'importe partir à n'importe quel prix, mais depuis la crise les acquéreurs (liés au marché, ce n'est quand même pas une surprise ...) sont devenus plus regardants.
Comme en témoigne cet article (que j'ai enfin lu),les conditions pour que le jugement de qualité reprenne un peu de vigueur sont là. Du moins, je l'espère ...

Concernant l'absence de hiérarchie qui transforme potentiellement tous les objets en œuvres (excréments fabriqués "ingénieusement" compris), l'article s'appuie sur une quantité d'exemples. J'ajouterai que la loi seule limite l'étendue des possibilités de subvertions "artistiques", le cas de cet artiste chinois, dont le nom m'échappe un peu volontairement ne tenant pas à lui faire de publicité, qui a, lors d'une performance publique, mangé des fœtus humains après les avoir fait frire est exemplaire.
Bon appétit !



Modifié 2 fois. Dernière modification le 10/05/2010, 11:34 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Henri Gaud
Date: 10/05/2010, 12:00

<<Avant le XVIII ième il n'y avait pas de critique, l'art était jugé par les pairs et les commanditaires.

Comme aujourd'hui me semble-t-il.

<<A la Renaissance il y avait de grandes rivalités entre les artistes pour obtenir les commandes des églises, des princes et des communes, le Tintoret et Titien étaient immensément riches, l'art était donc déjà lié à l'argent.

Il n'y a qu'à Lascaux qu'on ne connait pas le prix de l'artiste, les archives ont disparues hélas :-(

<<Aujourd'hui la critique est reléguée au rang de médiation ou de communication, et le jugement de valeur se fait désormais aux enchères. Et de ce côté on a pu voir tout et n'importe partir à n'importe quel prix, mais depuis la crise les acquéreurs (liés au marché, ce n'est quand même pas une surprise ...) sont devenus plus regardants.

Mais qui es-tu donc pour dire ce genre de chose : "on a pu voir tout et n'importe partir à n'importe quel prix" tu crois que tu as un jugement universel et intemporel ? (même si je suis un peu d'accord avec toi, l'œuvre d'art c'est plutôt le doute que des certitudes).

<<Comme en témoigne cet article (que j'ai enfin lu),les conditions pour que le jugement de qualité reprenne un peu de vigueur sont là. Du moins, je l'espère ...

Mais comment juger la qualité en Art, autrement que pas des avis de spécialiste trop sûr d'eux. La qualité, Je la vois dans la diversité, et sur ce sujet, cela fait pas mal de temps que l'on est plutôt bien servis.

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No Pasaran
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Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: Zoran
Date: 10/05/2010, 12:33

"La qualité, Je la vois dans la diversité, et sur ce sujet, cela fait pas mal de temps que l'on est plutôt bien servis."

La qualité existe évidemment. L'article parle de ce qui se passe au centre de l'attention médiatique, là ou les œuvres sont les plus regardées et (donc) les plus chères, il dit à la fin ce qui est rejeté aux marges.
Si la diversité existe, elle n'est pas traitée sur un principe d'égalité dans la visibilité. On montre et parle de ce qui est le plus cher, pas de ce qui est le plus intéressant.
Il y a des exceptions, la récente expo de J Wall à Paris est passée presque inaperçue dans les médias, il n'y a pas eu foule et pourtant les œuvres se vendent 480 000 dollars. Le travail a une vraie densité, il porte des significations potentielles multiples et ne repose pas sur une séduction immédiate. C'est une exception car la richesse conceptuelle de l'œuvre convie le regard du spectateur à une attention forte et exigeante, quand les travaux des artistes cités ici mettent toute leur ingéniosité pour défaire cette exigence et vider les œuvres de tout contenu. Ce n'est pas une critique, c'est le programme qu'ils ont eux-même défini.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 10/05/2010, 12:35 par Zoran.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: henri peyre
Date: 10/05/2010, 13:58

Xavier R écrivait:
-------------------------------------------------------
> Alors l'art est pollué depuis toujours exception
> faite des impressionistes, des fauves, des Dada,
> des cubistes et expressionnistes abstaits, puis
> tout recommence à partir du pop art.
> Je prends la peinture comme point de repère
> historique.

Le problème est qu'il y a un émetteur, une oeuvre et un récepteur.

Pour moi tout commence par la nécessité au niveau de la fabrication (de l'émetteur). Si le type ne fait pas oeuvre par nécessité de sens, je dis simplement que c'est mal parti, et cela depuis tous les temps. A ce titre l'art brut (l'art des fous) m'a toujours fasciné. Les tentatives surréalistes de "libérer" l'émission créatrice originelle semblent un peu artificielles. A partir du moment où on a un cerveau qui fonctionne convenablement rien n'empêche de fabriquer aussi l'oeuvre avec ; le cerveau ne fait pas disparaître la nécessité a priori.

Le problème apparaît au moment où l'oeuvre doit être commercialisée et que celui qui la fabrique le sait, et plus encore si, en plus, il a faim ou que son commanditaire se pique d'intervenir. Il apparaît d'autres genres de nécessité (obéissance, nécessité de gagner son pain, nécessité de produire plus...) qui portent ombrage à la liberté du créateur et viennent polluer toute autre nécessité intérieure.

Il me semble donc absolument évident que la volonté d'un artiste de se positionner sur un marché est déjà en soi inquiétante par rapport à la qualité de son oeuvre.

N'y aurait-il donc alors pas de belles oeuvres d'artistes professionnels ?
Nous savons tous qu'il y a pas mal de fort belles oeuvres au contraire. C'est qu'un artiste qui rencontre le succès, dans la commande ou la volonté de plaire, peut travailler toute la journée à sa production et y améliorer sa dextérité, là où le coeur pur, perdant tout son temps dans la nécessité de gagner sa vie autrement que dans le bel art ne pourra plus s'entraîner suffisamment pour rester à un niveau technique suffisant.
Ainsi on a bien souvent des coeurs purs dont le niveau de fabrication est assez faible, et des artistes professionnels au travail peu intéressant mais techniquement au point.

Dans une période d'hyper concurrence avec les amateurs, comme aujourd'hui, les artistes professionnels particulièrement menacés par les coeurs purs ont tendance à inventer un jargon et des postures qui les éloignent de toute confusion possible et montrent vraiment leur état de professionnel. C'est là le principal secret de la fabrication d'un art contemporain. Il est aujourd'hui basé sur l'imitation parfois caricaturale de la recherche scientifique (dont on admire secrètement la puissance), la mise en valeur de ce qui intéresse le plus le public (provocation et sexualité), un jargon approprié (grand classique de toutes les chapelles professionnelles).

Je rejoins assez Henri Gaud quand il dit que le grand changement c'est la concurrence.
Il y a peut-être aussi un autre grand changement évidemment très lié : on gagne plus facilement sa vie qu'autrefois et donc on peut aussi plus facilement faire des oeuvres d'un certain niveau en restant en marge de la profession.
Ces oeuvres risquent de rencontrer le goût du public plus facilement que celles des professionnels, obligées de paraître plus absconses pour se distancier de celles des amateurs. Pour rester dans la course, les professionnels doivent alors d'un autre côté renforcer la provocation. Le système est en place. Tenir à l'écart les amateurs et atteindre quand même le public... pas facile, hein. C'est le grand écart !
Seule solution pour stabiliser un système par nature en difficulté permanente (type politburo) : entraîner les masses, parfaire l'éducation du peuple, enrôler tout le monde, empêcher que les gens pensent par eux-mêmes en leur faisant peur, créer des cadres du parti pour faire tenir la règle malgré le mécontentement général.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: GERARD
Date: 11/05/2010, 09:44

à H.PEYRE
J'apprécie particulièrement votre paragraphe premier fondamental ... et le dernier anecdotique à l'échelle de l'existence de l'humanité . J.G.

Re: * la remarque de mai *
Envoyé par: gp
Date: 11/05/2010, 11:51

henri peyre écrivait:
------------------------------------------------------
> Seule solution pour stabiliser un système par
> nature en difficulté permanente (type politburo) :
> entraîner les masses, parfaire l'éducation du
> peuple, enrôler tout le monde, empêcher que les
> gens pensent par eux-mêmes en leur faisant peur,
(…)


Oui, ça on le vit déjà ! ; )


> Je rejoins assez Henri Gaud quand il dit que le
> grand changement c'est la concurrence.


Autre changement majeur : la spéculation. L'œuvre d'art est un produit financier et pour atteindre l'objectif de rendement associé à cette fonction il faut miser sur des choses bruyantes et voyantes. C'est tout l'esprit de notre époque : 1/ la visibilité donnée à celui qui fait le plus de bruit (au détriment même de la profondeur de la pensée) ; 2/ une économie de spéculation financière, dissociée de la réalité.
L'engouement pour tel artiste est de même nature et tout aussi irrationnel que l'engouement pour un actif financier, fût-il "toxique". Tout ce qui compte, c'est la promesse du gain futur, registre dont usent les politiques, d'ailleurs… (" gagner plus" qu'y disait ! )
A la vacuité du projet politique actuel répond la vacuité de la production artistique en vue.

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