Auteur: Michel Prik
Date: 12-12-2007 17:03
Pour répondre à Victor,
pour avoir beaucoup travaillé en traitement des images, j'ai bien suivi l'évolution technologique -la non évolution surtout car dans les méthodes de travail cela n'a pas changé tant que cela- ainsi que l'évolution des prix.
Quand j'ai démarré professionnellement la photographie voici une trentaine d'années, la guerre des prix n'existait pas vraiment. Un tirage pro en 13x18 pouvait se vendre l'équivalent de 100 euros d'aujourd'hui en devise constante, je ne parle que du tarif labo, et un tirage amateur 10x15 : 4 euros. Un poster amateur -sans collage ni cadre- : 250 euros. Un reportage de mariage pouvait rapporter jusqu'à 10.000 euros -d'aujourd'hui- pour l'intervention d'un seul photographe. Je ne crois pas que ce soit courant aujourd'hui bien que le métier n'ait pas changé tant que cela. Les photographes se sont dévalorisés, voilà tout. Certains diront démocratisés, d'autres diront dévoyés.
Pour autant c'était une époque où la qualité même en pro était assez relative, qui permettait à un nouveau venu de s'installer en étant plus cher que les autres et trouver quand-même sa clientèle s'il travaillait bien.
Quand les minilabs ont fait leur apparition, ils n'ont pas baissé les prix pour la plupart mais accéléré les délais en gardant la marge de sous-traitance pour eux. Ce sont les labos industriels qui ont les premiers baissé leurs tarifs en réaction, et ceux qui n'avaient pas de minilab qui ont rogné sur leurs marges pour conserver une part significative de clientèle.
A part cela, les prix n'ont pas vraiment baissé jusqu'à une période récente, ils se sont essentiellement maintenus dans un contexte général d'inflation.
Les vraies difficultés de l'univers photo se sont présentées bien avant l'arrivée du numérique, au moment de la guerre du Golfe où toutes les économies se sont effondrées. La plupart des activités ont redémarré par la suite mais les photographes trainent la patte à des degrés divers depuis cette époque. Sevran, le plus gros laboratoire d'Europe avec quelques 1.500 employés, a progressivement réduit sa voilure jusqu'à fermer au début des années 90.
Puis est venue la loi sur la transparence des budgets publicitaires qui a imposé de nouvelles contraintes aux photographes comme aux labos, puis sont venus les cost-killers, puis est apparu le phénomène des images numériques, toujours en cours. avec à chaque fois un cocktail d'investissements à réaliser pour moins de marge bénéficiaire.
Autant le dire, l'évolution s'est faite essentiellement sur le dos des employés qui ont presque toujours travaillé plus pour gagner moins. Oubliées depuis longtemps les conditions de travail Kodak avec les horaires à la minute près, la cantine, le CE, la bibliothèque, les boissons gratuites, les pauses cigarettes, la participation aux bénéfices, les crédits faciles, etc. J'oubilais une chose essentielle : la fierté, parfois.
Il me semble que l'on arrive au bout de ce cycle aujourd'hui avec des fermetures en masse, le moins cher étant aussi celui qui ferme.
Ceux des prestataires qui resteront ne seront pas les plus chers, ce seront les seuls. C'est toute la différence. Leurs prix ne seront pas les plus chers ou les moins chers, ce seront leurs prix que l'on acceptera ou pas, sans trop d'alternative autre que de réaliser le travail soi-même avec adresse ou maladresse selon les cas, sans bien en mesurer le coût réel et sans toujours en contrôler la qualité et la pérennité.
On n'échappera pas je crois à ce nouveau phénomène à diffusion rapide façon domino, la question étant de savoir qui sera bon et qui sera moins bon.
En dehors de quelques standards comme la digigraphie ou la photographie argentique c'est encore assez flou.
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