Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 26-05-2007 12:46
J'interviens tardivement, et je remarque qu'on a pas fait le parallèle avec l'un des derniers portraits de Sa Majesté Élizabeth II, dont je ne retrouve plus le lien, un belle image où on voit la Reine en train de regarder pensivement vers un paysage champêtre. (amis de G-P, à l'aide pour la référence !!)
Tout d'abord on remerciera encore J.L Llech pour la galerie des portraits, je dois dire que je partage assez ses analyses, à quelques nuances près (voir plus bas). Il me vient à l'esprit qu'il existe peut-être une galerie équivalente pour la Confédération Helvétique, mais là où nous n'alignons que six éminents personnages depuis 1958, la Confédération en alignera bientôt une cinquantaine, vu le régime de rotation rapide en vigueur à Berne.
Dans la V-ième République Française, les pouvoirs du Président font qu'il est investi à la fois de lourdes tâches exécutives et qu'il doit également incarner la continuité de la Nation, sur le plan historique et symbolique. Les républiques où le Président n'a pas le pouvoir ou les monarchies parlementaires européennes dissocient astucieusement les fonctions exécutives, réservées au chef du gouvernement, des fonctions de représentation symbolique du chef de l'État ou du souverain (H/F comme on dit dans les petites annonces d'offres d'emploi).
Du coup le boulot des photographes officiels me semble facilité lorsque ces deux fonctions sont dissociées.
Le dernier portrait d'Élizabeth II est un donc cran au-dessus des portraits français officiels du Président de la République, car il exprime parfaitement l'Angleterre éternelle, il exprime peut-être un peu moins le Royaume Uni, nuance qui rappelle de très durs conflits politiques pas si anciens que cela dans les Îles Britanniques.
Concernant le portrait de l'actuel Président français, la bibliothèque évoque plutôt pour moi la continuité symbolique que le travail. Pour moi ce serait plutôt ce drapeau européen qui dit : y'a du pain sur la planche. En France, je ressens le drapeau tricolore comme la marque de la présence de l'État et de ses fonctionnaires dans le pays. Par exemple on trouverait étrange de lever les couleurs B-B-R (on dit bien : R-V-B !) auprès d'un refuge de montagne de la République. L'alpiniste harassé au retour d'une grande course aurait l'impression d'arriver à la gendarmerie ou à l'ÉNSMM de Besançon le jour du 11 novembre ou du 8 mai.
Alors qu'en Suisse, le drapeau est là lorsque le refuge est gardé, en toute simplicité. Et il n'est pas gardé, me semble-t-il, par des fonctionnaires ni des militaires (les miltaires de la Confédération ont leurs propres refuges pour leurs sorties entre hommes, comme c'était le cas autrefois dans les clubs alpins ;-)
Donc dans l'actuel portrait officiel du Président français, les drapeaux évoquent pour moi les fonctions exécutives, le drapeau européen étant là pour souligner les ambiguïtés sur le lieu où s'exerce le pouvoir dans l'Europe des vingt-cinq.
Rappelons qu'à l'époque de l'Europe des Six, il y avait, si je compte bien, parité entre les républiques et les monarchies parlementaires, le Benelux (j'aurais envie d'écrire : bénélux, mais ce serait sans doute une erreur, un peu comme écrire xénotar ;-)) contrebalançant parfaitement trois Républiques voisines.
Reste la fameuse bibliothèque vitrée. On remarquera que pour le portrait du Général, et là je suis entièrement J.L. Llech, point besoin de drapeau, on sait qui est le Général et ce qu'il a fait pour le pays. Pour M. Pompidou, normalien littéraire, la bibliothèque s'impose, mais on me permettra à ce portrait suranné de préférer l'extraordinaire évocation de Vasarely qui est au Centre Pompidou. À la fois discret, sobre et parfaitement évocateur de la figure de celui qui fut le parrain du Centre, je trouve que cette figure en découpe n'a pas pris une ride.
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Digression : l'an dernier je suis passé à Montboudif, le village de M. Pompidou, c'est au dessus de Condat, dans le Cantal, aux confins du Puy-de-Dôme, pas loin du pays de Cézallier-Sancy. C'est un endroit que j'adore, j'y suis encore retourné en avril, c'était un enchantement de fleurs extraordinaire. Le petit village de Montboudif évoque parfaitement ce que pouvait être le point de départ d'un cursus honorum à la française à une certaine époque.
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Un dernier mot sur les bibliothèques vitrées. Certes il est juste et bon que les livres rares de l'Élysée soient abrités derrière des vitres. Mais à titre personnel et à usage familial je n'ai jamais vu l'intérêt des bibliothèques vitrées. Ou bien un livre est fait pour être lu, et on le met sur une étagère en accès direct, ou il doit être mis hors de portée des jeunes âmes ou des petites mains pleines de confiture, auquel cas on le met derrière une porte fermée à clé comme l'eau de Javel ou les médicaments. Une amie, certainement bonen ménagère, prétendait que les livres attirent la poussière, j'ai un peu de mal à trouver une explication rationnelle à ce phénomène, je crois plutôt que la poussière se dépose sur les livres qu'on ne lit pas. Auquel cas les mettre derrière une vitre est encore pire, là on est sûr qu'ils ne sortiront plus jamais.
Je ne sais pas s'il vous est déjà arrivé d'être hébergé chez des amis dans une chambre où il y a une biblliothèque. Si c'est une bibilothèque vitrée, je n'ouvre pas. Si c'est une étagère, je ne me gêne pas, je prends et je lis.
Du moins c'est comme cela que je conçois l'accès aux livres. Dans pratiquement toutes les bibliothèques de lecture publique que je connais, (je ne parle pas des bibliothèques d'étude et de conservation) les livres sont en accès direct sur des étagères. Point de vitres. J'applique donc volontiers ce principe de service public à l'usage familial.
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