Auteur: Jean-Louis Llech
Date: 05-11-2007 11:38
Sur un plan général, Alain-Marc, je me souviens toujours de cette phrase : "Ce n'est pas la girouette qui tourne, c'est le vent"
Sur un autre point, je voudrais rebondir sur la remarque - que je partage entièrement : "Kodak est un bel exemple de ces magnifiques boîtes qui ont (presque) disparu car elles ont oublié leurs clients qui faisaient leur prospérité."
Je la relierais à cet autre sujet qui reprenait le communiqué du président de Hassleblad, et à certains de ses commentaires : dans le monde actuel, les techniciens sont de plus en plus remplacés par des financiers.
Ils ont comme caractéristiques essentielles :
a) D'ignorer totalement les produits qu'ils fabriquent et vendent.
b) De privilégier le chiffre d'affaires au détriment de tout le reste,
b) De totalement mépriser l'opinion des clients, de ne pas rechercher le "feed-back",
c) De supprimer sans vergogne toutes les valeurs qui ont fait la réputation d'une marque : fierté - orgueil - de l'appartenance à l'entreprise, écoute des clients, culture du savoir-faire et de l'expérience, amour-propre et respect de la parole donnée et des engagements pris, culte de l'histoire de la société, culture de ses racines...
Je relis de temps à autre ici et là les pages consacrées sur certains sites à l'histoire de l'entreprise :
Linhof : "When the new millenium began Linhof has been producing for over 100 yeras already cameras, optics and other high tech products which are "stopping the time" and the moment in sharpness, detail and precision. There is hardly any better technique or medium to describe the change.
Photography and their tools are closely connected with the name Linhof. In the last decades radical changes in all fields of photography took place. Autofocus, automatic features, miniaturized 35 mm cameras were all achieved and then followed by digital imaging, networks and new image media.
This technical revolution is another challenge for the world's oldest independent camera manufacturer to be mastered successfully. Linhof's employees with their strength and know-how , their motivation to create new designs, challenged to cope with new technologies and with their ongoing work on innovations will be the guarantee that the name Linhof will remain a hallmark for applied photography in the future.
Thousands of photographers, artists, architects, scientists, engineers and printing people worldwide are presently using new or previously owned Linhof precision cameras that were made in Munich / Bavaria.
With Linhof the traditional fine mechanical precision of Valentin Linhof is combined with the requirements for digital and opto-electronic imaging."
Et pour moi, ce ne sont pas que des mots. Il y a de la fierté là dedans.
Quand je relis la déclaration de C.Poulsen, c'est froid comme un bilan, impersonnel comme un compte financier.
Quelques "enrobages" pour annoncer - pas faire passer, seulement annoncer - les décisions "stratégiques" qui ne sont que des choix financiers.
Quand je relis cette déclaration, qui parle des H3D et H3DII comme des "produits qui ont rencontré le plus grand succès dans les 50 ans d'histoire de la société Hasselblad", le pauvre Victor doit se retourner dans sa tombe. Le "500" ? c'était quoi, ça ?
Les demandes pour le H3DII, qualifiées "jusqu'à présent d'énormes", c'est du cocorico ou de la méthode Coué ?
Quand je prends la phrase "En retirant de notre gamme des modèles qui ne sont plus vraiment demandés, nous pouvons concentrer davantage de nos ressources sur ce que les photographes disent attendre de notre part : la capacité de réaliser de superbes photos."
Je la "dépiaute" comme ceci :
"On retire des modèles qui ne sont plus demandés."
Prenons l'exemple de la série 200... ils ne sont plus demandés, évidemment parce qu'ils ne sont plus produits. Mais sur le marché de l'occasion, le 203 et le 205 n'ont jamais été autant recherchés. S'ils étaient remis en production, je crois que ça se bousculerait.
Comment interpréter la phrase "les photographes disent attendre de notre part". On ne dit pas "ce qu'ils attendent" , non, on dit ce qu'ils "disent attendre". Tout dans la nuance. On est toujours à temps de dire, en cas de problèmes, que ce sont les photographes qui ont mal formulé leurs attentes. Devrait faire de la politique, le boss...
Enfin "attendent...la capacité de réaliser de superbes photos" Là aussi, un chef d'oeuvre : ce qu'on a fait jusqu'à présent, ce n'était rien. Les superbes photos, c'est pour demain.
Peut-être est-ce que j'interprète, c'est possible. Peut-être suis-je de mauvaise foi, probablement.
Je ne suis pas utilisateur de Hasselblads, et je n'ai donc pas le "ressentiment du cocu".
Non, globalement, ce qui me gêne, c'est que partout les financiers remplacent les techiciens, les décisions ne sont pas dictées par les demandes des clients, mais par la rentabilité. Quelque part, dans le monde actuel, c'est logique, voire nécessaire.
Le but n'est pas de vendre - de bien vendre - de bons produits. Non, c'est d'assurer, année après année, semestre après semestre, la plus grande rentabilité financière, et de garantir aux investisseurs que "la machine marche bien, et marchera encore mieux demain", à condition de garder l'équipe en place, of course.
Nous sommes bien loin de la fierté affichée dans le texte sur l'usine Linhof, du magnifique coup de chapeau donné au personnel, et même des outils pour réaliser de "superbes photos".
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