Auteur: Nicola
Date: 07-07-2005 17:01
Henri, vous votre idée est trés cartésienne bien que votre travail n'en soit pas l'image...
" ne pourrait-on changer pour nous mêmes et malgré la pression sociale l'ordre des valeurs sur lesquels nous constituons notre bonheur ? "
" il vaut mieux changer l'ordre de ses désirs que l'ordre du monde " en substance....
Or cette position indique, précisément une volonté pratique de se CONFORMER à ce qu'EST l'ordre du monde auquel nous sommes confrontés. Cela répond à la question de l'éthique, ou comment vivre en harmonie avec ses semblables?
Vous conviendrez que c'est donc cette position qui est des plus conventionnelles puisque la finalité qu'elle poursuit, est la conformité non à la singularité de ses désirs et pulsions mais à un idéal hiérarchisé (par ex: le pacte social, l'Etat, la culture, l'information, la loi, l'éducation, le Bien et le Mal, les canons de la photographie, etc...).
Si pour certains, cette conformation remplit avec succés la vacuité de leur vie (sécurisation), pour d'autres cette "nécessité" est vécue comme un diktat (c pas le vote qui nous fait participer au pacte social et à la démocratie par ex...), un mécanisme de domination qui peut avoir un effet pathologique (stress, anxiété, déréalisation) selon la réponse qu'on lui donne.
Face à de tels mécanismes où les valeurs d'un temps donné (dont le principe est la finitude) sont ressenties comme un système hiérarchique de domination, un autre Henri et non moins fameux, a décrit 3 possibilités de réponses possibles:
Soit l'inhibition (de l'action), soit la fuite, soit la lutte. Si nous ne pouvons ni nous faire plaisir, ni fuir, ni lutter, il ne nous reste plus que la soumission qui est la manifestation de l'inhibition des actions possibles pour faire face. De fait, la souffrance et les pathologies guettent dés lors que ce mécanisme de domination se manifeste au niveau individuel comme répression, compétition, représentation imaginaire de supériorité ou d'arbitraire, voire comme intimidation.
Quand vous dîtes, Henri, " Si cela est possible peut être bien qu'un grand nombre de cris n'indiquent que la douleur de ceux qui les poussent à ne pas arriver à autre chose que de rester, hélas, bien conventionnels ! "
...vous avez raison quelque part en rapprochant la souffrance (dont le cri est la manifestation) du conformisme et d'affirmer que l'autre est la raison de l'un. Mais, au contraire, je pense, comme Gonzesse, que la manifestation de cette souffrance, le "cri" de Marc Dantan, est déjà la première pierre jettée par une volonté pour NE PAS RESTER, pour se libérer de cette souffrance et, ainsi, sortir de l' "inhibition" qui l'occasionne.
L'imagination de l'artiste, carburant de la création, est le levier grâce auquel il dépassera, par la fuite, ces mécanismes de domination qui peuvent l'opresser s'ils ne le sécurisent.
Le conformisme ne fait pas appel à l'imagination. Reproduire n'est pas créer. De l'autre côté, être révolutionnaire c'est être conformiste-anti....ainsi conformisme et anti-conformisme sont les deux face opposées d'une même pièce !!
L'artiste n'est pas anti-cartier-bresson ou anti-capitaliste, ni pro-numérique, conceptualiste ou pro-communiste, alter-mondialiste....il laisse à son imagination la possibilité de trouver d’autres valeurs, d'autres structures formelles à son médium ou d'envisager d'autres structures sociales grâce à la mécanique combinatoire qui procède de cette faculté et qui s'expriment par la maîtrise du medium.
Je pense que le Rock a été de ce point de vue-là une sorte de conformisme (anti, certes!)....tant sur la forme musicale, que sur le discours (discours qui critiquait et tentait d' "inventer" un monde nouveau, certes, mais qui était empruntés à de grands penseurs qui l'ont précédé).
Cependant, "être wouuôk 'n woll" dans l'esprit du cri de Marc Dantan, c'est peut-être prendre conscience d'un grand conformisme de la photo contemporaine, quant à la forme et quant au contenu...ou peut-être, comme le suggère Henri, une prise de conscience sur soi-même de son propre conformisme...
Mais cela augure, sans doute, je l'espère et le soutient à 300%, une maturation de Marc à travers la fuite de ce conformisme " vers des rivages inconnus qui surgiront à l’horizon des calmes retrouvés. Rivages inconnus qu’ignoreront toujours ceux qui ont la chance apparente de pouvoir suivre la route des cargos et des tankers, la route sans imprévu imposée par les compagnies de transport maritime."
Marc, je vous comprends, je vous soutiens et si votre discours n'est pas sans risque, j'espère qu'il sera, pour vous, trés fécond !
Bien à vous tous.
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