Auteur: Jean-Louis Llech
Date: 04-03-2005 10:58
Mon (gros) grain de sel :
1°) L'informatique et tous les produits dérivés sont de très gros producteurs de déchets.
Les écrans, les batteries, les piles, les circuits imprimés constituent une énorme quantité de déchets, qu'on sait plus ou moins - plutôt moins - recycler.
Un appareil photo numérique, ou un notebook, ce sont des batteries - plus des piles. Et ces batteries sont rarement recyclées dans les règles de l'art, si je puis dire.
2°) La rapide obsolescence de tous ces produits "jetables" augmente considérablement la quantité qui est répandue dans la nature. D'où l'accroisssement du problème depuis quelques années.
3°) Sans vouloir détourner le débat, auquel je souscris totalement, je voudrais souligner un point capital : on culpabilise le citoyen moyen sur ses quelques dizaines de kilos de déchets produits annuellement. Mais c'est le principe de l'arbre qui cache la forêt, et une superbe manipulation.
Culpabiliser l'individu permet de détourner l'attention des énormes, des colossales quantités de déchets et de pollution des différentes industries lourdes pour lequelles le recyclage se traduit par des dizaines de millions d'euros de dépenses et donc de perte de profit.
Et là, on tombe hélas dans un problème purement politique. Pourquoi hélas ? parce que dès qu'on dit cela, on rentre sur un terrain glissant. Le couplet sur la loi du profit etc...
La non signature du protocole de Kyoto par les USA est vitale pour eux, parce que le respect de ce protocole signifierait une décadence totale du mode de vie des électeurs américains. Et aucun homme politique "censé", pardon pour l'adjectif, ne risquerait de perdre sa réélection pour essayer daméliorer la vie sur la planète.
Plutôt laisser tout crever - de préférence chez les autres - que de demander une réduction de la consommation des produits pétroliers et d'autres produits comme les emballages plastique etc.
Tous ces produits sont indispensables pour maintenir le niveau de "l'american way of life", donc le niveau de consommation, donc le niveau de production, donc le niveau de l'emploi, donc le vote des électeurs. Applicable aussi en Europe et donc en France.
Dans aucun pays, y compris chez nous, aucun élu n'est disposé à faire fermer des usines polluantes sur sa circonscription, et même s'il était tenté de le faire, les groupes de pression existants dans la quasi-totalité des parlements savent comment le calmer.
C'est ce qui me gène là-dedans. Votre préoccupation de départ est juste, et tout à votre honneur. Mais je crois sincèrement qu'il ne faut pas se laisser culpabiliser, parce que c'est le meilleur moyen de laisser les coudées franches aux gros pollueurs.
Je ne veux pas dire qu'il ne faut pas que nous ayons, les uns et les autres, et moi le premier, un comportement responsable. Mais je ne crois pas qu'on soit dans le vrai problème.
Des exemples ?
- On promeut dans certaines villes et villages le tri sélectif chez l'habitant. Mais comme à l'autre bout de la chaîne rien n'est prévu pour traiter les déchets, tout se retrouve en vrac au bout de la chaine. J'ai assisté à cette énormité. Et après avoir fait les campagnes de publicité pour le tri sélectif, distribué poubelles et livrets de tri, on ne pouvait décemment pas avouer aux électeurs que tout finissait en vrac dans le même site à cent kilomètres de là, par manque d'usine spécialisée.
- Des analyses bactériologiques désastreuses de l'eau de mer des plages, en France, sont passées sous silence et enterrées par les pouvoirs publics locaux, pourtant responsables de l'état sanitaire des plages.
Cela s'est fait sous la pression des élus locaux, relayés par des responsables politiques de très haut niveau, qui ne veulent à aucun prix voir "couler la saison touristique".
- Une usine qui ferme et qui enfouit des tonnes de batteries et de déchets de pyralène, et dont la friche industrielle sert quelques années après de terrain pour un lotissement, au vu et au su de tous les responsables politiques et administratifs est un autre problème, infiniment plus grave.
- Les lisiers de Bretagne, les industries de rejets, les usines polluantes un peu partout en France, tous survivent grâce aux menaces des industriels de fermer le site et de licencier tout le personnel si les services sanitaires font trop de zèle. Et aucun préfet ne peut rester insensible à ce genre de menace.
- Quand les déchets sont traités, tout le monde a bonne conscience, mais quand les rejets aériens d'une grande partie des usines d'incinération ne sont pour ainsi dire jamais traités, quel problème a t-on résolu ?
Je ne dis pas qu'il ne faut pas se soucier du traitement de nos rejets chimiques de chambre noire, et il faut tout mettre en oeuvre pour ne pas rajouter nos déchets à ceux déjà existants.
Mais je veux seulement faire comprendre que les deux litres de révélateur sont une goutte d'eau dans un océan de merdes diverses répandues pour le profit de quelques uns.
Pardonnez moi ce long déballage. Vous pouvez toujours m'objecter que ce sont des lieux communs, des banalités, des délires gauchistes, que tout le monde est au courant. J'en suis conscient, oui, et que fait on ?
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