Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 06-11-2004 23:00
Bonjour M. Pasture. Chaleureuse bienvenue.
Tout d'abord je voudrais vous apporter mon soutien dans votre travail personnel qui consiste à fabriquer des images de la meilleure précision possible par un transfert optique traditionnel. Certes, vos images ne sont pas photographiques à niveau de gris ou de couleur, elles sont pourtant "artistiques" au sens ancien des Arts & Métiers, mais par hypothèse vous conviendrez qu'elles s'excluent du champ culturel et esthétique qui nous fournit de si grandes et de si nobles discussions sur ce forum.
Je dirais donc : votre problème est très technique, donc d'une certaine façon, c'est plus simple car nous n'avons pas à invoquer Merleau Ponty ou votre rôle en tant qu'artiste dans la société pour pour essayer de résoudre votre problème ;-);-)
Mais il s'agit de haute résolution. Donc ici vous êtes chez vous.
Vos images sont photographiques mais "au trait" et à grand contraste ; ce genre de prise de vues a été pratiquée en arts graphiques et dans l'industrie pendant des décennies avant que la génération directe de photomasques pour la micro-électronique, ou bien la combinaison ordinateur + machine spéciale ou scanner+imprimante ou "flasheuse" de haute performance pour les arts graphiques ne relègue le banc de repro ou l'agrandisseur optique, au mieux au musée, au pire à la ferraille. On ne dessine plus de dessin réel, on dessine dans le monde virtuel et c'est en bout de chaîne que l'image se forme.
Il y a plusieurs problèmes dans votre question.
Le premier problème est celui d'un repérage double face précis.
Le deuxième problème est la qualité et le parallélisme de votre statif.
Le troisième problème est la qualité de votre objectif en termes de piqué et de distorsion.
Sur le premier point vous ne pouviez pas mieux tomber.
Vendredi dernier avec mes étudiants de l'ENSMM de Besançon nous avons travaillé à faire une photolitho double face, mais par contact avec une machine professionnelle travaillant au micron. Rassurez-vous je ne vais pas vous suggérer l'achat d'un équipement qui côute en occasion le même prix qu'un capteur photographique silicium 22 mégapixels neuf, mais certains principes sont à retenir. Et l'achat de matériel de photolitho d'occasion ou de bancs de repro dont personne ne veut plus est une solution pas si absurde que cela.
Nous avons donc travaillé vendredi dernier au délicat problème de l'alignement de deux photomasques en translation/rotation au micron près. Entre ces deux photomasques dûment alignés nous insérons une plaque sensibilisés qui est éclairée par deux lampes des deux côtés. Plus bas je vous soufflerai une solution possible par contact pour votre problème double-face.
Sur ce point concernant l'alignement double face. Partons d'images parfaites et qui se superposent parfaitement. ; à première vue, peu importe que chaque image soit entachée de distorsion, du moment que les pistes et les cercles à percer tombent au même endroit, chaque image étant supposée affectée de la même distorsion. Le fait qu'il faille retourner une image pour la superposer à l'autre n'influe pas, car la distorsion est en principe symétrique. Supposons pour commencer deux images parfaites, et qui se superpoent parfaitement trou contre trou, car les deux dessins sont différents.Il faut donc bien définir des marques & croix d'alignement astucieuses. Dans les photomasques que nous utilisons sur plaque de verre, on met les deux images sur chrome l'une contre l'autre, chrome contre chrome, avec du film ce sera gélatine contre gélatine pour éviter le défaut de mise au point éventuel dû à l'épaisseur du film.
Vous conviendrez que même avec une optique Starlith de chez Carl Zeiss, le Saint Graal de tout photo-lithographe, même si le statif de prise de vue est un Granit Bleu de Guéret , le meilleur du monde, supportant une mécanique de précision jurassienne, avec des coulisses au micron en salle dépouissiérée, si vous n'avez pas une procédure stricte permettant l'alignement double face pour vos deux images à transférer sur votre plaque époxy cuivrée, vous aurez toujours un résidu de translation et de rotation entre les deux images. Résidu de translation sans aucune rotation, c'est un cas académique, mais cela se traduit par le fait qu'aucun trou ne tombe en face de l'autre, d'une face à l'autre. Autre cas-limite : résidu de rotation avec zéro translation ; dans un coin : le trou perce bien, par exemple cela tombe en face dans le coin en bas à gauche, mais en haut à droite ce n'est plus aligné.
Donc il faut être sûr que lorsque vous transférez vos images sur une face puis sur l'autre vous prenez bien les cotes comme il faut et qu'il n'y a pas de résidu de rotation + translation. Sous un agrandisseur, vous allez démonter le film de la première face pour remonter celui de la deuxième face et faire l'expo N°2. Comment alignez-vous les deux faces ???
Je vous proposerais donc une autre méthode par contact. L'idée est inspirée d'un système à cassette simple dont nous nous sommes servis en laboratoire pour faire des images de 10x10 cm avec des détails de 5 microns environ avant d'acheter la machine dont je vous ai parlé.
L'idée est d'aligner les deux masques, qui dans votre cas devraient être des films tendus sur des cadres métalliques, puis de mettre en sanwich la plause sensibiliée entre les deux. Des tiges fixées dans le cadre inférieur et traversant le cadre supérieur, forcent les deux cadres à être dans la même position lorsqu'on les presse l'un contre l'autre.
En tirage photo avec masque de contraste on perfore les films une fois bien alignés et on les remonte sur des tiges bien placées et de bon diamètre soutenue par une cadre métallique. Dans votre cas je pense que des cadres métalliques sont indispensables pour faire les choses bien.
Il faut donc un moyen de bouger le film du cadre supérieur pour qu'il coïncide avec le film inférieur, puis on l'immobilise d'une façon ou d'une autre. En agrandissement classique avec masque on perfore les deux d'un coup une fois bien alignés. C'est une solution possible pour vous.
On met ensuite la plaque sensibiliée en sandwich, peu importe comme elle tombe et peu importe si ses bords sont taillés à la hache plutôt qu'au microtome, on s'en moque totalement, puisque les deux images à transférer par contact sont pafaitement alignées par la cassette. L'idée est qu'on ne se sert plus des bords de la plques comme repère d'alignement double face. Pour laisser la place au circuit à insoler, les deux cadres s''écartent de l'ordre de 1à 2 mm mais si les tiges sont bien perpendiculaires au plan des cadres, vous n'aurez guère de décalage de translation. Ou du moins il faudra percer les trous parallèlement aux tiges de la cassette d'insolation. Vous insolez une face puis l'autre sans bouger, ce qui suppose un pressage fort, la cassette emprisonne le circuit pré-sensibilisé bien fermement, l'affaire est faite, les images latentes sont parfaitement alignées, vous développez, vous gravez double face au perchlorure.
Il vous faudra une façon de fabriquer des films à l'échelle 1 qui soient très précis puisqu'on va travailler par contact. Vous ne pouviez pas mieux tomber sur ce point également puisque de nombreux photographes à la chambre qui animent ce forum travaillent par contact en particulier avec des procédés photochimiques comme les gélatono-bromures classiques, les cyanotypes, les platonotypes, les gommes, etc...
Je pense que la précision des fims pour arts graphiques doit être meilleure que 10microns ce qui devrait suffire pour votre application.
Je ne remettrais pas en cause le statif lui-même dans un premier temps. En revanche les rapports 1:1 et 1:2 dont vous parlez sont tout à fait dans les cordes d'un objectif apo-repro d'occasion qu'on trouve, sans obturateur, pour des sommes de l'ordre de 50 à 200 euros. je pense à un G-claron ou un apo-ronar de 150 sans obturateur, ou un autre objectif d'arts graphiques de ce genre dont nous louons les performances à usage photographique : pour une fois qu'ils seraient utilisées dans leur vrai domaine de compétences, vous pensez !! Donc il ne faut pas vous priver d'aller chercher un tel objectif. Utilisés au rapport 1:1 ces optiques parfaitement symétriques sont exemptes de distorsion, leur performance n'est limitée que par la diffraction si on les ferme à f/22-f/32, ouverture nominale à l'infini, ce qui vous donne respectivement des images avec une précision de 40 à 60 microns au rapport 1:1 (2F-2F, le nombre d'ouverture et l'effet de diffraction sont doublés par rapport à l'infini-foyer).
En résumé et à mon avis par ordre de priorité.
1/ vous réfléchissez à la technique de la cassette presse-film double face à l'échelle 1 faite à partir de deux films de bonne résolution que vous allez pouvoir caler pile-poil,
2/ vous recherchez éventuellement un apo-repro et vous oubliez votre lentille simple, mais vous gardez votre objectif d'agrandisseur,
3/ si cela se trouve vous sauverez de la ferraille pour le franc symbolique et pour le prix de l'essence de votre véhicule un très beau banc de repro professionnel avec une optique " de course" montée dessus, ce qui soulagera votre Krokus de cette tâche délicate.
Ce sera le moment de faire évoluer la carrière de votre Krokus de la technique vers l'art. Vous le garderez précieusement et vous vous mettrez en chasse d'une chambre de presse 6x9 pour faire de belles images à modelé continu sur rollfilm que vous agrandirez selon les procédés de votre choix. Ce sera l'occasion de revenir nous voir pour d'autres aventures photographique.
Bonne continuation et tous nos voeux de réussite.
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