Auteur: Henri Peyre
Date: 20-02-2004 08:01
Bonjour,
à propos de http://www.galerie-photo.com/robert-musil-esthetique.html
Pas vraiment de réponse alors, mais sur le même ton bonhomme ;-)
« Vous devez savoir,je pense, que le panthéisme s'oppose par essence au monothéisme »
Je ne suis pas vraiment d’accord avec le terme « s’oppose »
Il n’est pas question de s’opposer mais d’englober. Il s’agit plutôt d’un effort de dépassement. Par ailleurs historiquement, n’est-ce pas le monothéisme qui se serait opposé au panthéisme ?
« et que vous balayez en quelques dizaines de lignes 2000 ans de civilisation judeo/chretienne,on peut certes penser que celle ci n'est pas l'exclusive des 6 milliards d'individus qui peuplent notre planete, mais on peut penser aussi faute de perfection que c'est celle qui protege le mieux l'homme contre lui même.De la parution des évangiles a la déclaration universelle des droits de l'homme en passant par la controverse de Valladoid, le fil de l'histoire si il peut nous sembler long nous montre clairement que nous avançons lentement mais surement vers un monde plus humain où nous même en tant qu'individualité avons plus de souveraineté.Au regard de l'histoire,notre sociétè de -consommation en tous genres- que certains déplorent,n'est qu'un aleas,une experience sociétale vers quelque chose qu'obligatoirement nous saurons rendre meilleur. »
Je ne suis pas vraiment aussi optimiste que vous.
Globalement la société améliore l’homme, mais l’efficacité des moyens de destruction croit bien plus rapidement que la sagesse des hommes de cette civilisation, elle-même pas forcément celle qui protège le mieux l’homme contre lui-même. Ajouter qu’ « obligatoirement » la société sera meilleure demain me semble un vœu pieux (sans lequel il est difficile de vivre, c’est vrai).
« Comme changement a cette sociétè raisonnée mais imparfaite où l'homme est le centre de nos préocupation,vous posez en principe un nouveau rationnalisme:le monde selon vous reposerait sur un systeme génèral d'illusions dont nos sens seraient les premieres victimes,éparpillé dans l'apparence des êtres et des choses, notre moi véritable serait partie intégrante d'un grand tout venant de nulle part et a finalité indéfinissable,la comprehension de ceci devant bien évidement promouvoir l'avénement d'une sociétè nouvelle où l'homme en tant qu'individualité aurait disparu,pour laisser place a la déïté qui est en lui. »
« ceci devant bien évidement promouvoir l'avénement d'une sociétè nouvelle »
S’il y a un tel avènement, il viendra surtout des cœurs. Je souligne assez que les idées de Musil sont peu actives politiquement. Elles agissent plutôt sur le récepteur que sur le monde lui-même. Elles prônent surtout que la grâce qui peut nous atteindre ne viendra pas du changement extérieur, de l’environnement politique ou social, mais du changement de la qualité de notre propre regard. De notre capacité à être capable d’être mobiles dans l’évaluation des choses. Mettons que pour le militant politique c’est toujours la faute des autres, pour le musilien c’est toujours à cause de soi si cela ne marche pas… ;-)
« Appuyant votre demonstration sur -la tentative de réponse philosophique-présente dans l'oeuvre littéraire de Musil,vous occultez totalement l'arrière-plan psychosocioculturel musilien qui est la matiere de sa toile de fond litteraire et le fondement même de sa tentative de réponse philosophique. Nous savons tous que Musil n'est pas un philosophe,un écrivain de talent certes dans la veine d'un Kafka d'un Joyce ou d'un Proust,mais pas un philosophe au sens que Musil n'a construit aucun systéme (ce qui aurait étè un paradoxe au regard de son discours). »
Philosophie = amour de la sagesse.
Personne n’a jamais dit que la philosophie était l’amour du système ! (même si la philosophie allemande nous a fourni quelques beaux échantillons de philosophes-sytème ;-))
Pour la sagesse et pour l’amour, tout est bon. Vous avez des philosophes qui utilisent la poésie et ont horreur des systèmes (Nietzsche).
« Nonobstant ce fait vous mettez en avant la formation scientifique de Musil pour accréditer cette -nouvelle connaissance objective de la réalité-,Musil etait un scientifique, donc l'irrationnalité contenue dans son oeuvre litteraire(comme dans d'autres, ex:Du côté de chez Swann:les madeleines- de Proust)est recevable en tant qu'enseignement et nouvelle connaissance du monde. »
Non. L’esthétique de Musil, à laquelle je me suis intéressé dans l’article, n’est pas une nouvelle connaissance de monde. C’est un rapport au monde qui est susceptible de me rendre heureux. Ce n’est même pas un enseignement. Cette voie me plaît, j’en parle ;-)
« Au regard des systemes élaborés par,le brahmanisme,les néo-platoniciens et spinozza,l'experience amoureuse de l'eleve Torless ou les madeleines de Proust font bien pale figure,mais ces sytemes sont plus facilement critiquables alors que la poesie de Proust ou de Musil passent plus facilement dans la promotion d'idées panthéistes.
Opposé à la fois au créationisme chrétien et au dualisme de la philosophie aristo-platonicienne,bases sur lesquelles notre sociétè est bati,le panthéisme laisse l'homme sans tuteur(dieu pour les créationistes,le bien et le mal pour les dualistes),dieu lui même, il se proclame auto régulateur de ses actes.Perdu dans une attitude sceptique en face du monde sensible et des données de l'expérience humaine qu'il rejette(illusions des sens),en proie constante au doute,perdu dans un grand tout impersonnel et fade,il perd tout réferenciel a la realité,perdant de fait sa valeur intrinseque d'être humain qui est d'être une personne autonome responsable est libre celle d'être un poete en somme »
Là je ne comprends pas vraiment ce que vous voulez dire. J’aime assez l’idée de l’homme sans tuteur. Personnellement j’adore la raison, mais il y a un moment, au bout de la raison, où on est bien démuni. Peut être c’est bizarre, mais ces moments là, assez irrationnels, nous apparaissent comme les grands moments de notre vie. Qu’est-ce qu’on fait avec cela… On accepte de les subir, ou on essaie de théoriser encore un peu plus loin, de rationaliser et de comprendre jusqu’à nos états d’extase ? C’est je pense la voie bien rationnelle que je choisis, derrière Musil. Je veux comprendre là où la raison d’ordinaire à cessé de trouver un emploi… Finalement nous avons peut-être exactement les mêmes préoccupations rationnelles ! ;-))
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