Auteur: Jimmy Péguet
Date: 06-11-2002 22:48
Tu oublies Vera Iconica (celle-ci, j'avais parié avec un copain sur un numéro, elle a tenu deux). Et Contrejour (je ne me souviens plus comment elle s'appelait, celle-là).
Camera, ça fait déjà un moment qu'elle a disparu. Photographies magazine, ça ne date pas d'hier non plus. Il me semble qu'il se sont plantés un peu pour les mêmes raisons que Pour voir, en moins caricatural (je ne me souviens plus bien, il y avait peut-être aussi des histoires de sous ?). En ce qui concerne Pour voir, j'étais furax. Je m'étais abonné dès la première heure, ce que je ne fais jamais, parce que le mélange me semblait heureux, et les intentions intéressantes. Parler de tous les courants de la photo, avec de bons articles, une maquette réussie, une gravure et un papier plus que corrects, une vraie rubrique livres. Tout ne me plaisait pas, mais je trouvais qu'on ne prenait pas le lecteur pour un con, qu'on lui montrait des choses et des auteurs qui sortaient de la routine habituelle. Je me disais donc "Chic, enfin une revue grand public qui montre un peu autre chose". J'aurais dû me méfier : dans mon trou, il en arrivait quatre à la maison de la presse. Au bout d'un mois, il en restait trois en rayon les bons mois. Et je suis tombé des nues quand la plupart des gens à qui je parlais de Pour voir frisaient du nez en me parlant d'une revue pour intellos. A la fin, je comprends, mais au début, bon dieu, c'est désespérant. Là où je ne vais pas pleurer, c'est quand ils ont consciencieusement creusé leur tombe, quand ils ont durci la ligne éditoriale, et quand les tenants du contemporain pur et dur ont pris le pouvoir. Certains ont compris et essayé de rectifier le tir, mais il était trop tard. Il y a vraiment eu des numéros difficiles. Faut savoir à qui on cause, comme dit Henri P. Le problème, c'est que microcosme, comme il dit, n'en a rien à foutre d'une revue pareille, et que la plupart de ceux de "l'autre monde" n'en ont rien à foutre non plus. Avec ça, qui va acheter ?
Moi, ça m'irait assez bien, une revue comme celle-là : ce n'est pas exactement celle dont je rêverais, mais puisqu'il faut en vendre suffisamment pour vivre, alors tant pis pour quelques concessions.
Photo nouvelles, c'est autre chose. Ils sont partis en pères pépères. Pas d'abonnement, pas de risques, certainement pas de gros frais, une maquette minable au début. On pouvait se dire que cette gestion de rentiers allait les sauver. Mais ça n'a finalement pas marché, parution hasardeuse, maquette peu attrayante, des pages techniques totalement inintéressantes plaquées là on ne sait pas trop pourquoi. Je n'avais pas bien suivi le truc, ils ont dû passer des mains d'En vues à d'autres mains, c'est peut-être pour ça que la revue m'a toujours paru un peu brinquebalante. Dommage, j'aimais bien quand ils parlaient de livres ou de manifestations, j'aimais bien à la fin les photos qu'ils montraient, j'aimais bien cette revue malgré son côté austère.
Je crois que Tin a un peu raison quand il se demande s'il y a de la place pour une revue de photo. Encore que je ne croie pas vraiment que beaucoup de photographes lisent Art press et consorts. Et puis je crois que l'amateur de photo est un peu comme l'amateur de SF : même si la SF moderne ne parle plus vraiment de ça, il aime bien malgré tout lire de temps à autre des trucs avec de grands vaisseaux intersidéraux et de petits hommes verts par-ci par-là. Revenir à ses fondamentaux. Mais la photo, c'est peut-être un trop petit monde aujourd'hui pour qu'une revue autre que techno-consuméro-machinchose ne soit rentable ?
Moi, je n'ai pas envie de papier glacé ou de trucs comme ça. Je regrette l'objet revue, le plaisir de la lecture du matin, l'article qu'on se garde voluptueusement pour le soir. Je veux juste qu'on me cause un peu de tout, qu'on me donne à voir de tout. Qu'on m'éblouisse, qu'on m'assassine, qu'on me fasse réfléchir, qu'on me cause de livres, d'expos. sur quelque chose de bien mis en page et de correctement imprimé. Si on ne me casse pas les pieds avec le matériel, ce ne sera pas plus mal (mais s'il faut en causer pour vivre, je n'ai rien contre, si ce n'est pas de la resucée plaquée de qui-vous-savez), . Et si on parvient à traduire sur le papier le lien qui existe avec les autres arts, sans m'emmerder ou me la jouer élite contemporaine, ce sera encore mieux. Finalement, et ça ne m'amuse pas de dire ça, ma petite revue, je me la fais sur l'internet. C'est moins hiérarchisé, plus bordélique, mais j'y trouve finalement autant de plaisir. Avec malheureusement mille fois, le papier en moins.
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