Auteur: Emmanuel Bigler
Date: 13-01-2004 10:46
Le sujet est tout à fait passionnant, et je me demande si le choix d'un bon logiciel ne serait pas plutôt guidé par l'inventaire des problèmes techniques à résoudre en fonction du but recherché, plutôt que par le choix de l'éditeur et le prix du logiciel ;-);-)
Si je me replonge 20 ans en arrière dans les problèmes de correction géométrique et photométrique des images prises par satellite, je me rends compte --je me répète-- que, certes les outils des chercheurs sont maintenant disponibles pour les photographes à faible prix, mais que les problèmes à résoudre restent les mêmes.
Si on prend cet exemple consistant à fabriquer une carte géographique par assemblage d'images de satellite, on s'aperçoit que le problème principal n'est pas de raccorder les images mais de les préparer correctement en vue de cet assemblage final qui est finalement la tâche informatique la plus simple. En effet, il faudra faire choix d'une projection qui est une table de correspondance entre les millimètres sur la carte et les coordonnées géographiques sur la sphère ; en amont il faudra recalculer ces coordonnées géographiques à partir d'une projection oblique de l'image enregistrée par le satellite ; vu l'obliquité, une correction photométrique sera nécessaire également. Pour mener à bien cette tâche, il y a 20 ans les ingénieurs devaient repérer des points de contrôle au sol, de coordonnées connues, ce qui permettait de calculer les formules de transformation nécessaires à la correction géométrique.
Mais j'arrête là car je vais faire peur à M. de Feraudy qui était tout rasséréné que galerie-photo, comme il se doit, lui ait fourni rapidement de bonnes pistes ;-);-)
La plupart des logiciels de traitement d'image disponibles permettent l'assemblage bord à bord par translation manuelle, éventuellement une aide par reconnaissance automatique des pixels identiques, ce qui facilite la tâche. Les problèmes, me semble-t-il, sont en amont avec la correction géométrique et photométrique des différents 'lés' à assembler. Par exemple, je ne sais pas si les logiciels sus-mentionnés sont capables d'effectuer des rotations fines des images en plus des translations. Je me réjouis donc des informations fournies par Yves C. concernant l'existence de logiciels bon marché permettant de travailler la correction géométrique des images à assembler.
Le plus simple me semble être l'assemblage d'images enregistrées avec un détecteur plus petit que le champ image disponible, cela peut être un châssis 6x9 qu'on translate pour couvrir le 6x17, ou bien l'assemblage hypothétique de capteurs 24x36 qu'on déplacerait dans le plan image d'une optique de chambre. Dans ce cas, le raccordement par translation suffit car il n'y a pas de correction géométrique ; il ne devrait pas y avoir de correction photométrique si ce n'est la chute de lumière globale en bord de champ qui peut se corriger sur l'assemblage final.
Essayons de faire un petit inventaire des cas d'espèce, Yves C. pourra compléter, et peut-être M. De Feraudy pourra-t-il préciser ses desiderata, ce qui l'aidera dans le choix de ses méthodes & outils informatiques.
Pour ce qui est de la photographie d'architecture, on pourrait imaginer d'assembler des vues prises en se déplaçant sur un échafaudage en face de l'édifice à photographier. Si la façade est plane, on peut imaginer qu'il n'y aurait aucun problème. En fait il y a toujours des fenêtres, sauf sur les édifices modernes verre-et-acier, et si le raccordement tombe sur une fenêtre, les bord de fenêtre seront vus de deux points de vue différents entre deux vues adjacentes. D'où un effet bizarre propre à mettre en difficulté le raccordement. On peut se faire une idée d'un bord de fenêtre en projection plane mais vu d'un point de vue oblique dans le livre de Pierre Groulx, cas d'école d'un édifice de Montréal vu avec un fort décentrement latéral.
L'autre façon de procéder consiste à reconstituer par ordinateur sur une image plane (qu'on peut courber par la suite éventuellement) une succession d'images prises du même point de vue en tournant l'appareil autour d'un point judicieusement choisi, en l'occurence la pupille d'entrée de l'optique si on veut rester politiquement correct par rapport aux précédentes discussions sur ce site ;-);-). De ce fait on va essayer de reconstituer l'impression visuelle d'un observateur humain dont l'oeil balaye angulairement le champ. On voit que ce troisième cas est très différent des deux précédents ; c'est en général le problème du raccordement panoramique classique. Je ne sais pas comment Henri Gaud a procédé avec ses vitraux de Chartres, j'imagine qu'il a plutôt utilisé cette méthode-ci plutôt que la méthode de l'échafaudage ;-);-)
Dans ce cas, le fait que l'image finale soit acceptable ou pas dépend beaucoup du sujet. Pas de problème en paysage, apparemment peu de problèmes avec la vue générale de Venise ; signalons néanmoins qu'il y a parfois des grilles de protection sur les toits des monuments (p. ex. le Campanile de Florence) ce qui corse singulièrement le travail du raccordeur panoramiste ;-);-)
Pour un bâtiment moderne avec de grandes lignes droites, le raccordement d'images vues depuis un point fixe va induire un rendu sous forme de lignes brisées ; René Bouillot dans son livre sur les Moyens Formats fustige cette pratique comme étant un truc d'amateur à condamner avec la plus grande sévérité ;-);-) mais que cela soit acceptable esthétiquement ou pas me semble finalement secondaire par rapport à l'autorisation de publication de l'architecte : il pourrait s'y opposer, se considérant comme trahi par ces lignes brisées !! D'où l'intérêt de se concentrer sur le patrimoine ancien, au moins les bâtisseurs de Chartres ne peuvent plus faire valoir leur droits devant les tribunaux, si l'image photographique les trahit ;-);-) (raison de plus, nous explique Henri Gaud, pour être d'un scrupule extrême lorsqu'on travaille en photographie du patrimoine !!)
L'oeil raccorde angulairement des champs de 5 degrés et l'impression visuelle globale fait beaucoup appel à la mémoire. Peut-être y aurait-il un travail expérimental consistant à segmenter l'image en portions de 5 degrés carrés, et au prix d'un travail d'assemblage informatique titanesque, peut-être l'effet de ligne brisée serait-il tellement atténué que l'assemblage pourrait devenir harmonieux même sur un édifice avec de très longues lignes droites.
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