Auteur: E. Bigler
Date: 27-09-2002 11:08
La question posée est, me semble-t-il, indissociable de l'espèce de « norme industrielle de fait »
qui s'est imposée dans la photographie grand public où on exprime les angles de vue ou de champ
dans une unité qui est le « millimètre équivalent 24x36 ».
Cela me rappelle cette histoire contée par un professeur d'électricité et d'électronique de la
faculté des sciences. Dans les années 1960, le courant domestique passe progressivement du 110 au
220 (je dis « courant » volontairement, car c'est l'expression consacrée). Il est alors possible à
peu de frais pour les petits appareils de faible ampérage d'ajouter une « résistance chutrice » qui
ramène grosso-modo le 220 à 110, permettant ainsi de continuer à utiliser les anciens appareils de
faible puissance sans la dépense d'un transformateur. Le professeur calcule donc avec toute la
précision scientifique qui s'impose la valeur de la résistance qui lui est nécessaire. Il se rend
chez le marchand du coin, prend acte par avance qu'il faudra choisir une valeur qui approche celle
de son calcul dans ce que le marchand lui proposera, et annonce qu'il veut une résistance de tant
d'ohms. Le marchand le sermonne pour son incompétence : « Mais voyons, monsieur, une résistance
chutrice, cela se mesure en watts ». De fait, c'est sans doute des watts qui étaient écrits sur le
carton ou gravés sur ces résistances que les fabricants proposaient alors pour le grand public.
Revenant à la photo, cherchez dans le descriptif commercial d'un appareil numérique quelle est sa
focale vraie, vous la trouverez à grand peine car tout le monde s'en moque ; de plus les chiffres
vrais étant plus petits que ceux du 24x36 équivalent, on pourrait penser que les zooms de ces
appareils sont "moins puissants".
D'autre part tout concourt depuis les années 1960 à évacuer, dissimuler, passer sous silence la
formation de l'image réelle dans les appareils 24x36. Finalement, même dans mon Bessamatic avec son
verre de visée clair, je ne sais pas qu'une image réelle se forme quelque part. Quand je change de
focale, je grossis ou je rapetisse mes objets en diminuant ou en augmentant, respectivement, l'angle
de champ. Évidemment je vois bien que mécaniquement mon 135 est un truc assez long, mais entre mon
50 et mon 35 ce que je vois surtout c'est que le 35 a un gros oeil rond qui semble tourner lorsque
je me mets sur le côté, vu de devant. Je vois plus d'angles, donc, avec un 35 qu'avec un 50 : c'est
la seule évidence.
La boucle est bouclée avec les compacts zooms où le viseur est à angle variable, pour lequel il
n'est vraiment plus possible de savoir si on est en format APS, 24x36, 4,5x6 ou numérique autrement
que par le volume de l'appareil et la dimension des négatifs qui en sortent à la fin, du moins pour
les appareils à film ; mais là encore tout se passe, au nom du progrès, comme si l'industrie avec
l'APS et le numérique veut absolument nous cacher le fait qu'il se forme *physiquement* une image
sur un support.
Enfin pour terminer avec un clin d'oeil à tous les sens du terme, sachant que les viseurs-zoom des
appareils compacts sont un peu comme de petits télescopes, donc des systèmes afocaux : f = 0, mais
qu'est-ce qui peut bien changer quand je change de focale, puisque de nulle, la focale de ce viseur
reste nulle entre le 28 et le 90 ? ;-);-);-)
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