Auteur: marinoel
Date: 08-12-2005 19:39
Bonsoir à tous, je vous copie l'article du Monde :
On peut se demander si finalement, chercher à créer des images qui se conservent longtemps à vraiment de l'intérêt... En tout cas visiblement pas trop pour l'Etat...
Pourtant il y a... heu... quelques années, j'avais eu la chance de pouvoir accéder aux collections fort bien conservées au Fort de Saint-Cyr, et de manipuler quelques plaques... Ah! avoir Sarah Bernard dans les mains ! (à l'époque où elle était jeune et belle...)
C'est vrai qu'il y a peut-être des choses plus urgentes à régler, mais ça fait mal au coeur quand on pense à tout le boulot que ces photographes ont fait !
Bonne lecture...
Marinoel chagrine
Enquête
L'Etat est accusé de négliger des fonds photographiques dont il a la charge
LE MONDE | 08.12.05 | 14h40 • Mis à jour le 08.12.05 | 14h40
Paris, le 23 novembre, était organisée une vente de photos peu commune : les 43 000 euros récoltés financeront les actions en justice d'une association qui agite la photographie depuis plus d'un an. L'Association de défense des intérêts des donateurs et ayants droit de l'ex-Patrimoine photographique (Adidaepp) accuse l'Etat de négliger les fonds dont il a la charge.
Les seize fonds ont été réunis, dans les années 1980 et 1990, par le ministère de la culture grâce surtout à des donations, parfois des achats : on y trouve les archives d'André Kertész, des oeuvres du photographe de plateau Roger Corbeau, le fonds des studios Harcourt, ceux de photographes en activité, Michael Kenna et Bruno Réquillart ou le fonds Willy Ronis, qui en conserve l'usufruit. Soit une grande majorité de négatifs, mais aussi des tirages et de la documentation.
Jusqu'en 2004, ces fonds étaient gérés à Paris par une association, Patrimoine photographique, chargée de trois missions : la conservation, l'exploitation commerciale et la valorisation culturelle à travers expositions et livres. En avril 2004, Patrimoine photographique a été dissous pour se fondre dans une entité dédiée à la photographie, le Jeu de paume, qui, notamment, présente des expositions dans son lieu de la place de la Concorde.
Les fonds ont été déménagés de Paris au fort de Saint-Cyr, à Saint-Quentin-en-Yvelines. Leur conservation est assurée par la Médiathèque du patrimoine (ministère de la culture). La valorisation culturelle est du ressort du Jeu de paume, dirigé par Régis Durand. C'est aussi ce dernier qui a en charge la diffusion commerciale. Les ayants droit, regroupés dans l'Adidaepp, disent ne plus s'y retrouver : "Il n'y a plus d'interlocuteur unique", dénonce Françoise Denoyelle, présidente, qui réclame la nomination d'un conservateur dédié à ces fonds.
L'initiative de l'Etat visait à mettre fin à des dérives. Des rapports ont accusé Patrimoine photographique d'avoir négligé ses missions, de n'avoir jamais fait d'inventaire et de stocker ses fonds dans des locaux inadaptés à Paris. Cette association, au nom de l'Etat, a aussi accepté des fonds de qualité fort inégale alors que des noms prestigieux — Doisneau, Cartier-Bresson, Helmut Newton — lui ont échappé.
Mais dix-huit mois après la reprise en mains, les ambitions du Jeu de paume peinent à se concrétiser. Le secrétaire général de la direction du Patrimoine (DAPA), Manuel Bamberger, admet "un gros retard à l'allumage... Nous avons tardé à prendre en compte l'ampleur de la tâche". Le Jeu de paume solde encore un plan social lié à la fusion des trois associations. Sa constitution en établissement public a été refusée. Et la Réunion des musées nationaux, appelée à gérer la commercialisation des fonds, doit auparavant modifier son statut.
LE TRAVAIL FOURNI
La controverse principale concerne la conservation des fonds au fort de Saint-Cyr. Selon Mme Denoyelle, "plusieurs rapports disent que les conditions ne sont pas aux normes muséales internationales. Les fonds sont en danger". Bruno Réquillart, un des donateurs, accuse le fort d'avoir perdu trente mille négatifs de Kertész et plusieurs tirages de Michael Kenna. En guise de réponse, le responsable de la Médiathèque du patrimoine et conservateur, Jean-Daniel Pariset, ouvre le fort de Saint-Cyr. "Les tirages couleur sont en chambre froide, fait-il constater. Les fonds malades, comme celui de Sam Lévin, ont été séparés des sains pour mettre fin à la contamination." Et d'assurer : la conservation est bien meilleure à Saint-Cyr qu'elle ne l'était à Paris.
En ce qui concerne les "disparitions", M. Pariset plaide non coupable : "Pour Kertész, les négatifs sont tous là. Pour M. Réquillart, rien n'indique que les photos ont disparu après le déménagement ! Pour mettre fin au débat, nous allons financer de nouveaux tirages au photographe." Jean-Daniel Pariset insiste sur le travail fourni par deux attachés de conservation pour "trier" les fonds parfois arrivés "en vrac dans des boîtes". "L'ensemble du fonds Kertész a été remis en ordre, dit-il. Les fonds Gallup et Sénicourt ont été entièrement numérisés." Bref, beaucoup aurait été fait en un an. Dans une lettre ouverte, Bruno Réquillart accuse à mots couverts le Jeu de paume de ne pas verser aux ayants droit le juste pourcentage sur la commercialisation de ces fonds photographiques de l'Etat. "C'est faux et diffamatoire", s'insurge M. Durand. Pour calmer le jeu, le ministère de la culture a mis en place un comité des donateurs et annoncé le versement de 120 000 euros à la Médiathèque pour la numérisation des fonds. Le Jeu de paume verra la subvention que lui verse la DAPA réduite en 2006 "afin de traduire le transfert de compétences du Jeu de paume vers le fort de Saint-Cyr". Cette décision est contestée par M. Durand.
Reste à savoir comment gérer et valoriser des fonds principalement constitués de négatifs alors que ce sont les tirages originaux d'un photographe qui constituent son oeuvre définitive. "Ces donations ont été acceptées sans réflexion sur cette question", confirme Gilles Walusinski, vice-président du Jeu de paume. De la même façon, numériser des millions de négatifs, outre le coût astronomique et les années nécessaires, est-il opportun ? Faire un choix, mais comment ? Avec quelle compétence ? La numérisation, pour l'instant, a été confiée à la régie des établissements pénitentiaires.
Claire Guillot
Article paru dans l'édition du 09.12.05
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